La fille est transportée de joie. Elle va la retrouver -Odette. la comprendre. Elle va vivre avec elle de ce corps nourricier qui est celui de la lecture; C'est le legs. La découverte laissée à votre intention au fond d'un coffre. Comme dans les contes de fées. (p. 12)
je comprends lentement qu'écrire sur ses livres est une trouvaille géniale-je pèse mes mots-qui la soustrait aux questions que nous lui aurions posées si elle avait écrit sur des feuilles ou carnets.
Sont publiés ici, les carnets posthumes d'un écrivain. (...)
Voilà pourquoi votre mère n'est pas muette.
Volà comment Odette garde pied en société.
Le livre est une entrée de secours
(p.98)
"Reste encore un peu; ce que tu dis dans tes livres, je vais l'écouter. Flaubert, Proust ou tant d'autres, ils céderont leur tour. Je t'écoute, je t'écouterai. Les ai-je assez écoutés, eux, à ta place peut-être ?
La liste de ce qui ne se peut plus est immense. -Je peux lire- est immense. Je peux te lire, surtout . " (p. 14)
Et si je me trompe un peu dans l'ordre des mots, qui m'en voudra ? Avant de me reprendre; comme si ne savais pas que les mots sont affectés d'une présence...vibratoire. Qu'un mot auprès d'un autre, si pauvre ou même absurde que soit son sens, n'est jamais muet ?
A force d'obstination à basculer les mots en tous sens, ce qu'on a baptise l'indicible, on l'entend bien qui s'agite-pas tout à fait silencieux, non ? (p. 55)
Je lis quelques pages avant de commencer l'écriture
le matin.
(...)
Je supprime des adjectifs
je pousse des mots à côté en dessous
pour finir je retire le tuteur
Savoir si la page tient ?
(p.65)
Les vingt-trois livres écrits par Odette; j'ai la tentation d'en parler en évitant le poids de les rouvrir. Comme de textes qu'on sait par cœur. Et si je me trompe un peu dans l'ordre des mots, qui m'en voudra? Avant de me reprendre; comme si je ne savais pas que les mots sont affectés d'une présence...vibratoire. Qu'un mot auprès d'un autre, si pauvre ou même absurde que soit son sens, n'est jamais muet? A force d'obstination à basculer les mots en tous sens, ce qu'on baptise l'indicible, on l'entend bien qui s'agite- pas tout à fait silencieux, non?
Elle veut parler à quelqu'un qui est dans un livre- ou bien elle veut se mettre à l'abri dans un livre. On n'est pas étonnée par ce mouvement. On est étonnée de trouver sa mère- dedans.
Qu'elle soit venue chercher refuge
dans ce lieu
commun ?
(p. 21)
Ce n'est pas parce qu'Odette n'a presque plus de mots qu'elle n'échange pas. Maigret, Imogène, Rebecca, Hercule, Miss Marple, Roger Acroyd, avec eux le courant passe. (p. 68)
La fille sait déjà qu'elle va dévorer tous les livres. A la fin de sa lecture, qu'y aura-t-elle trouvé? Ne rien craindre: lire.
Je comprends les phrases qu'Odette a soulignées dans les romans comme ce qu'elle voudrait signifier; et ne peut d'elle-même formuler à cause de l'accès perdu à la mémoire des mots; dessaisie d'un langage autre que stéréotypé. (p. 93)