AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Fleitour


Récit poignant de la triste fin de Bernard, c'est l'humour et la dérision que Daniel Pennac va choisir pour lui parler et le faire rire une dernière fois.

Bernard dans cette nuit sans fin, perdu dans sa douceur de frère aîné a quitté la route. Daniel Pennac est vidé, exsangue, "je ne sais rien de mon frère". C'est un blanc dans son paysage intérieur, la rumeur impalpable d'un orphelin qui ne comprend pas, un orphelin ne sait pas exprimer un manque, une absence.


Alors il s'invente un jeu, il va jouer pour son frère une pièce de théâtre comme si son frère était au premier rang, prêt à rire, prêt à rire de lui même. Il décide de monter une nouvelle de Herman Melleville Bartleby.
Bartleby, une homme comme son frère dont il ne sait rien. Un frère qui ne dit rien car il est mort et un Bartleby qui ne dit rien, car il ne préfère pas, ou il préfère pas.


Et il va faire rire son frère Bernard, et Daniel aussi et nous avec, jusqu'à la dernière réplique jusqu'à son enfermement dans cette histoire sans fin de Bartleby, dans les couloirs de la prison aux Tombes. La prison aux tombes. La prison de Bernard qui lui cache la gratuité de son affection, ce qui lui restait de la douceur du monde.


Les souvenirs ruissellent dans sa mémoire, par d'infimes saccades, en répliques cinglantes ou par des clins d'oeil de complicité. "Soyez gentil l'année prochaine restez chez vous et envoyez nous un chèque" suggère page 41, Bernard à un estivant sans gène en colère.


L'enfant dyslexique se rappelle, de lui, de Daniel Pennac, le cancre, qui passe des heures à se corriger car il fait des fautes de grammaire, et sans un dictionnaire, rein n'est sur, rein n'est acquis. Bernard lui, il sait, il apprend, domine, maîtrise, comme on maîtrise une partition que l'on suit, dans le dédale de la vie, Bernard a le calme olympien de l'enfant, à qui tout réussi.


Mais l'autre, Daniel est perdu, dans les mots, ceux ci se dérobent prennent des sens, à contre sens, il ne voit que trouble, un mot en cache un autre, trouble, trouble comme la vie, si difficile à digérer.
Daniel Pennac est troublé quand Bernard après son suicide manqué, lui dit :
"tu es en train de me dire que tu m'as sacrifié ?
Le sacrifice suprême dans la résurrection !
Merci ! Vraiment !
Tu peux.
Vivre, ce n'est pas la moindre des choses."


Puis il y a ces paroles terribles de Daniel Pennac page 44, « mon frère "me paraissait immensément seul dans la maison du peintre. Il en habitait une pièce. Les autres étaient à l'abandon."

Et page 86 il pose ces mots : "chambre à part, pourquoi pas, après tout ?"
"Pour lui, ce ne devait être un exil, c'était une conséquence naturelle du délitement.
Lente décomposition affective avant la nuit du corps."

Un jour Bernard me proposa un gâteau sec, il y mit du gingembre. Me tendant la corbeille, il proposa.
Un Bartleby ?

Un jour pour le ressusciter Daniel montera sur scène pour jouer Bartleby.
Quand ?
Préviens nous on sera tous là pour lui, pour Bernard.

Commenter  J’apprécie          350



Ont apprécié cette critique (32)voir plus




{* *}