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Critique de EvlyneLeraut


Intuitif, sur le piédestal des questionnements, « Valencia Palace » est un grand livre. Ouvrir les rideaux d'une littérature hors pair, laisser les rais de lumière oeuvrer à la rencontre d'un verbe alloué au plus sincère langage de trois femmes. Kaléidoscope, dont le modèle est de loin ce qui est de plus plausible. Et c'est une opportunité rare. L'autorisation confirmée de se sentir concerné nous aussi. « Valencia Palace » est serré comme un café fort. Réaliste, âpre, il ne fait aucune compromission. Ici, pas de fioritures, nous sommes dans un drame qui va étendre sa toile subrepticement. Tout se passe dans un lieu de villégiature à Valence, trois jours qui vont sonner le glas de l'irréversible. Claire est là. Dans cet antre baigné d'insouciance. Avec son mari, sa fille Laure et son fils de 1 an. Cercle un peu bancal, Claire est en proie au bovarysme, sait déjà qu'elle sera le détonateur d'un orage fulgurant. « Une femme. » « Elle marche » « La femme de Valence » « Derrière elle, son sang a marqué goutte à goutte un chemin de petits cercles rouges sur la terrasse du soir. » Cette dernière s'approche De Claire, mais pas seulement. Elle est au bord du gouffre. Claire, elle, est imprégnée de langueur, de soleil et de doutes. En déni, elle refoule le visible, veut s'octroyer une chance de survie. Sentant le danger trop vif d'une transmutation. « Claire n'expliquera rien à sa fille de six ans qui la fixe de ses grands yeux noirs… » « Pourquoi tu as le sac maman ? » Claire va sombrer, une preuve sur la conscience, de l'acte sauveur manqué. Dans une mélancolie vive où même l'hédonisme, l'amour maternel n'a aucune prise pour la sauver elle aussi. Pas de rédemption pour Claire. Elle se juge coupable de la mort de cette femme. Ses tourments vont se gorger de culpabilité jusqu'à l'ultime point d'un non-retour. L'écriture de Annie Perreault pénètre le champ du sublime. Octroie le miracle d'un filigrane dégagé, absolument épuré. L'histoire change sa couleur de fond. On pénètre dans la vie. Sa fille, Laure grandissante va affronter les manques d'une mère, les douleurs d'un pavlovien recommencement en marathons salvateurs. « Je cours, maman, je cours, vois comme je cours, je ne pense pas à l'amour, je ne fais que courir et personne ne m'attend à l'arrivée. » Valence a le teint pâle mais les herbes sont brûlées par la chaleur. Les sentiments éclatés par ce qui reste après le néant. Les femmes ne sont pas des déesses, ni des êtres sans nom. Il y a dans ce récit la vulnérabilité des épreuves insurmontables. le chao de l'irrévocable. La contemporanéité côtoie cette intériorité qui perce au travers des persiennes existentialistes. Ici, dans « Valencia Palace » ce sont les fragilités qui font de cette histoire un chef- d'oeuvre. Pas d'espace pour le faux-semblant. On prend cette histoire en pleine face pour mieux s'émanciper à notre tour. Apprendre à franchir la ligne jaune. Fuir les chutes, affronter les appels d'air, les vides et vivre. Un grand roman sombre et nécessaire, publié par Les Editions le Nouvel Attila qui nous prouvent une nouvelle fois une ligne éditoriale majeure.
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