Mais on ne peut pas donner quelque chose que l'on n'a pas. Donc j'essaye de m'améliorer, tous les jours.
L'amour, et le courage, mec - les deux choses les plus importantes.
Ma mère et moi avons été abandonnés ensemble alors que, quand on y pense, on ne se connaissait pas vraiment.
Mon père a pris ses jambes à son cou, pour aller Dieu sait où. Il n'est pas rentré du travail ce premier soir, ni le deuxième. J'espérais qu'il rentrerait au bout de trois jours, puis d'une semaine, puis d'un mois. J'ai arrêté d'espérer au bout de six semaines environ. De toute façon, j'étais trop jeune pour comprendre où était la Californie et ce que signifiait "poursuivre son rêve de devenir acteur" - c'est quoi, un acteur, et où est mon père, putain ? Mon père, qui deviendrait plus tard un père formidable, venait de laisser son bébé seul avec une femme de vingt et un ans en sachant très bien qu'elle était trop heune pour être mère célibataire. Elle était certes une femme merveilleuse et très aimante, :ais tout bonnement trop jeune. On l'avait abandonnée elle aussi sur ce parking de la frontière entre les États-Unis et le Canada. Elle était tombée e ceinte à vingt ans et se retrouvait seule à vingt et un.
Lorsque j'ai eu neuf mois, mes parents qui avaient décidé qu'ils en avaient assez l'un de l'autre, m'ont installé dans mon siège auto à Williamstown, Massachusetts, et ont roulé jusqu'à la frontière canadienne - cinq heures et demie de route. je m'imagine parfaitement le silence de ce trajet. Je ne parlais pas, bien sûr, et les deux anciens tourtereaux à l'avant ne devaient pas se parler non plus. Mais je suis sûr que le silence à dû être assourdissant. Ce qui était en train de se passer était énorme. Là-bas, avec le bourdonnement des chutes du Niagara en fond sonore, Warren Langford, mon grand-père maternel qui avait tout d'un militaire, nous attendait, en faisant les cent pas et en tapant du pied, pour se réchauffer ou de frustration - ou les deux. Il nous a probablement fait un signe de la main quand la voiture s'est approchée, comme si nous venions pour les vacances. je devais être content de le voir mais c'était compter sans mon père, qui, de ce que j'ai compris, m'a sorti de mon siège auto, m'a tendu à mon grand-père puis nous a tranquillement abandonné, ma mère et moi.
J'avais besoin d'attention, je n'étais pas le petit bébé mignon et souriant que tout le monde avait espéré. Je vais donc avaler ça et la fermer.
J'étais donc dans les bras d'une mère angoissée, à pleurer sur son épaule de jeune fille de vingt et un ans, tandis qu'un dinosaure en blouse blanche qui avait à peine levé le nez de son bureau en chêne massif a dû marmonner un truc du genr : "Ah, les parents de nos jours" à travers son haleine fétide avant de rédiger une ordonnance pour un barbiturique hautement addictif. J'étais agité et en manque d'affection : on m'a donné une pilule. (Putain ça me rappelle toute ma vingtaine.)
Ne pas avoir de parent durant ce vol fait partie de la multitude de choses qui a forgé ce sentiment d'abandon qui m'a collé à la peau toute ma vie. Si j'avais été suffisant, je n'aurais pas été un gamin non accomagné, n'est-ce pas ? C'était comme ça que ça fonctionnait, non ? Tous les autres enfants avaient leurs parents avec eux. Moi, j'avais une pancarte et un magazine.
Et moi, j'étais terrifié, putain. J'essayais de lire mon magazine, Highlights, mais chaque fois qu'il y avait un trou d'air je croyais que j'allais mourir. je n'avais personne pour me dire que tout allait bien, personne vers qui me tourner pour être rassuré. Mes pieds ne touchaient même pas le sol de l'avion.
La ville qui palpitait, mon petit visage collé au hublot. Je me rappelle parfaitement avoir pensé que ces lumières, toutes cette beauté, ça voulait dire que j'étais sur le point d'avoir un parent.