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Critique de Saiwhisper


Une troisième lecture d'Éric Pessan et non des moindres ! J'avoue que, suite aux échos positifs de mes collègues ou les avis de Mikasa et d'Ichirin-No-Hana, je m'étais gardé « Dans la forêt d'Hokkaido » pour le week-end, afin de le lire en toute tranquillité. Je me doutais qu'avec la touche fantastique, j'allais partager le ressenti de celles qui me l'ont chaudement recommandé… Je n'ai finalement pas tenu et me suis jetée sur cette intrigue inspirée d'un fait divers. L'auteur met en scène Julie, une héroïne apparemment récurrente dans deux autres romans. La demoiselle semble avoir un don d'intuition depuis sa plus tendre jeunesse cependant, elle n'était pas préparée à se retrouver dans le corps d'un petit garçon japonais abandonné par ses parents en pleine forêt. Nuit après nuit, elle rêve de cet enfant perdu. Très vite, elle réalise que ce songe la touche plus qu'un simple cauchemar… Sa vision est nette, fluide et précise. Non seulement, Julie a l'impression d'être réellement dans cette forêt et dans ce corps étranger, mais en plus, elle subit les mêmes choses que le bambin ! Si celui-ci a soif ou est épuisé, il va en être de même pour elle. Se sentant de plus en plus faible, elle décide de comprendre ce lien télépathique et va chercher à sauver l'enfant malgré la distance qui les sépare et le côté surréaliste de la chose ! J'ai trouvé l'idée vraiment chouette. le mois dernier, j'avais déjà lu un roman abordant la thématique du partage des rêves où les âmes quittent leur corps pour aller voir ailleurs. J'avais trouvé le concept déroutant, original et intéressant. Une fois de plus, cela a fait mouche.

Que l'on adhère ou non au concept, les chapitres deviennent rapidement addictifs. Il y a une sorte de suspense qui pousse le lecteur à tourner les pages et à vouloir en savoir plus. Même s'il ne se passe pas grand-chose en termes d'action, le rythme est tout de même présent ! En effet, on se demande si le projet de Julie va aboutir et jusqu'où elle pourra s'en donner les moyens sans en périr… En effet, on distingue une véritable course contre le temps : Julie perd peu à peu des forces et devient de plus en plus fébrile et assoiffée… L'enfant se meurt progressivement. Et elle aussi. Il y a donc une tension grandissant au fil des chapitres, ce qui a rendu la lecture captive ! Par ailleurs, le style d'Éric Pessan est toujours aussi agréable à suivre : ses paragraphes sont aérés et il va souvent à la ligne, en particulier lorsque le moment est riche en émotions. Comme dans « Aussi loin que possible », les mots donnent l'impression d'être comme des pas ou comme le souffle des personnages… Les moments en forêt dégagent beaucoup de sentiments. A mes yeux, l'auteur a réussi à retranscrire l'ambiance de certains lieux japonais : il y a du mystère, de la beauté, une touche de divinité et de l'émoi.

Comme dans ses autres romans, l'auteur n'hésite pas à aborder des sujets d'actualité ou à montrer son engagement. Ici, il met en avant des migrants qui vont se faire expulser de l'endroit où ils se sont installés. le père de Julie, un élu, va leur tendre la main. Par son intermédiaire, Éric Pessan va prendre position et va démontrer à quel point on généralise autrui lorsque l'on aborde l'immigration… Bien que courte, la discussion entre ce père et l'héroïne m'a touchée… D'autres thèmes importants comme l'éducation, l'abandon d'enfants et la maltraitance vont être abordés. L'ensemble fonctionne bien. de façon subtile, l'auteur met en scène les thématiques de l'empathie et de l'entraide. L'héroïne se met bien à la place du garçon. Elle devient même cet enfant jusqu'à employer la première personne du pluriel. « Et j'ai faim, le garçon a faim, nous avons faim, une faim atroce qui nous tord le ventre, … » Julie partage et donne de sa personne. Il en va de même pour son père qui vient en aide à autrui, en particulier à Natnael, Ghirmay et Nahom. Un message important qui va toucher le lecteur de plein fouet.

Ces 132 pages ont défilé à toute allure. Comme pour les autres écrits d'Éric Pessan, c'était court… Sans doute trop ! En effet, certains personnages secondaires comme Elliott ou les trois migrants ne servent pas beaucoup à l'intrigue… J'aurais souhaité qu'ils aient une place plus importante… Certaines choses auraient pu être plus étoffées sans pour autant nuire à l'histoire principale. On n'a pas forcément le temps de s'attacher aux protagonistes cependant, on en vient à s'inquiéter pour eux et à être pris par le récit. Cela reste prenant et émouvant ! Une belle histoire fantastique que je recommande à ceux et celles qui aiment les émotions ainsi que les faits divers revisités…
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