Grandir et prendre de l’âge ne se font pas progressivement et en douceur. Un petit gamin chétif se met brusquement à grandir comme une asperge, une adolescente banale devient une beauté l’espace d’une nuit et un homme d’âge mûr bien conservé, qui aborde la soixantaine tout en paraissant quarante-cinq ans, comble la différence et fait plus que son âge en l’espace de quelques mois.
Couronnée de blond-roux, sa tête romano-celtique, aux yeux lapis-lazuli ciselés en longueur et indifférents, relevait de la statuaire plus que de l’humanité. George connaissait ce type physique local - une poignée de fossiles perduraient dans les vallées frontalières -, mais il n’avait jamais croisé ce superbe spécimen : Orrie Benyon, alias Orlando, l’homme qui admettait de bon cœur les incursions nocturnes de ses ancêtres fantomatiques sur son territoire. Un casque de bronze aurait mis en valeur ses boucles coupées militairement, son cou monumental et son nez droit ; pas étonnant qu’il reconnût ceux de sa race et se sentît à l’aise parmi eux.