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Enorme coup de coeur pour ce roman écrit en 1946, un livre-rupture dans l'histoire de la littérature puisqu'étant le premier écrit par une femme afro-américaine à connaître le succès ( plus d'1 million d'exemplaire vendues ) dès sa sortie , un événement dans une Amérique encore ségrégationniste d'autant que dans The Street, il n'est question que d'Afro-Américains et de leur douloureuse condition à Harlem.

La Rue, c'est la 116ème, entre les 7ème et 8ème avenues.
C'est celle des Noirs, des pauvres, celle dont on ne sort pas.
C'est celle de Lutie Johnson, mère célibataire, dont elle veut absolument sortir pour sauver son fils, une obsession qui la ronge.

Cela fait très longtemps que je n'avais rencontré une héroïne aussi marquante, une mère-courage belle, intelligente mais tellement plus que ses adjectifs clichés, une femme forte surtout qui a des valeurs et n'est prête à transiger avec la moindre même quand le piège de la Rue menace de se refermer sur elle, même quand la prostitution pourrait sembler une issue pour ne plus crever de faim.

En fait, c'est le grand roman de l'anti-rêve américain vu par les exclus. Le constat est terrible. A travers cette extraordinaire Lutie, on sent toute la douleur, la colère, la rage à se retrouver coincé dans la misère et la fatalité dans une Amérique faite pour les riches Blancs, à se sentir une proie pour les hommes qui rôdent lorsqu'on est une femme désirable.
Tous les autres personnages qui gravitent autour d'elle sont fortement dessinés et contribuent grandement à faire la Rue un univers clos et oppressant, profondément romanesque, des personnages comme sortis d'un conte terrible : Mrs Hedges, la mama proxo, défigurée, la vigie de l'immeuble insalubre où vit Lutie ; Mr Jones, le concierge libidineux et menaçant ; Boots Smith, le dandy séducteur ; Junto, le seul Blanc de l'histoire, qui règne sur le quartier ; Min, sa voisine qui recourt au service d'un mage pour ne pas se faire mettre à la rue par un homme qu'elle n'a jamais aimé.

La fin est magistrale, inattendue, déchirante, tellement radicale qu'elle m'en a coupé le souffle. J'ai refermé La Rue la rage au ventre.
Un chef d'oeuvre noir, brut et poignant.

Lu dans le cadre de l'US book challenge du groupe Facebook du même nom ( livre 2 : lire le roman d'une auteure ) https://www.facebook.com/groups/294204934564565/
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La rue c'est l'endroit de tous les possibles.

Dans les années 40, pour essayer de donner une vie digne de ce nom a son fils de 8 ans, Lutie Johnson loue un appartement à Harlem.
Mais cette magnifique jeune femme sait que pour y arriver il lui faudra faire des concessions. Beaucoup de travail, beaucoup de privations pour essayer de donner un avenir a son fils. Elle espère que vivre à Harlem ne sera que temporaire. Mais la rue se rappelle incessemment à la jeune femme. Entre la prostitution, les mauvaise fréquentations, les envies sexuelles du concierge, le non respect des hommes, le racisme des blancs, la jalousie des femmes,...

Ce roman est un roman noir dans tous les sens du terme. L'auteure arrive grace a son écriture agréable et fluide à nous décrire tous les travers des Hommes, de cette vie dans cette rue, de l'insalubrité des logements, des sentiments des personnages avec force et brio.
Elle arrive a nous faire garder espoir tout au long des pages et fini par un épilogue assez particulier.. j'avoue que cette fin je ne m'y attendais pas du tout.

Je remercie Babelio et les éditions Belfond pour cette très belle découverte. J'aime l'idée de rééditer ces beaux romans qui ont été oubliés par le temps.
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« Vous ne pouvez absolument pas voir à quoi ressemble un nègre. Vous ne le pouvez pas : un nègre n'est jamais un être humain. C'est une menace ; un animal, une malédiction, un déshonneur ou une plaisanterie ».

Et voilà, c'est dit.
Nous sommes à Harlem, dans les années 40. Dans un lieu sordide, un trou à rats, impasse de l'enfer. Saletés, cafards, cochonneries. Promiscuité abominable, violence à tous les étages, dans tous les recoins.
Les Noirs n'ont droit qu'à ça. Ils n'ont droit qu'à la haine des Blancs, à leur peur.

C'est là, dans cet antre du démon, la 116ème rue, qu'habite la jolie Lutie, mère d'un gamin de 8 ans. C'est une jeune femme courageuse, qui s'est séparée de son mari lorsqu'elle a découvert que celui-ci la trompait alors qu'elle travaillait pour des Blancs et que lui végétait, sans travail. Sort partagé par bien des femmes noires !
Son but ? Sortir de cette rue ! Sortir de ces conditions de vie effroyables. Trouver un autre lieu pour y élever son fils sereinement. Mais pour ça, il faut de l'argent.
« Quel être au monde n'aurait pas souhaité quitter cet abominable endroit ? Il n'y avait qu'un moyen : économiser. C'était un cercle infernal, auquel personne ne pouvait échapper. Les Noirs qui vivent à New York et qui n'ont pas d'argent ne peuvent habiter que des maisons comme celle-ci. Et pendant qu'ils travaillent au-dehors pour payer leur misérable loyer, la rue se charge d'élever leurs enfants. Elle leur sert de père et de mère. Père démoniaque, mère vicieuse, elle les modèle à son image. le peu de temps qu'ils lui échappent, ils n'entendent parler que d'argent ».

La prostitution ? Non ! Devenir la maitresse d'un Blanc ? Non ! Pourtant, être considérée comme un beau corps, un joli visage, voilà le lot de Lutie. Mais elle est tenace, opiniâtre. Entre la concupiscence des hommes – Blancs ou Noirs - , l'odeur immonde de la rue et des maisons, ou plutôt cages à poules, les brutes en tout genre, la misère intégrale, elle slalome. Elle lutte. Sa haine pour les Blancs ne fait que grandir...

Ce roman paru en 1946 par une auteure Noire est une bombe. Il nous explose en pleine figure. A chaque page, je me suis demandé pourquoi cette haine envers les Noirs, pourquoi cette mise au rebut, pourquoi ces soupçons continuels, pourquoi ce mépris. Pourquoi, pourquoi ?
Les points de vue adoptés par la narration sont divers, nous passons tantôt de la tête de Lotie à celle de Bub, son gamin, pour plonger dans celle du concierge, un véritable monstre, dans celle de la pauvre femme avec laquelle il vit, ou encore dans celle du riche Blanc, patron d'un bar et d'un dancing.
Alors là, on peut dire qu'on fait le tour de la question. La question noire. La question qui tue.

Merci à Babelio qui m'a proposé cette lecture en avant-première (ce roman qui avait été oublié est réédité ces jours-ci) et aux éditions Belfond pour leur confiance.
« La rue » est un roman qui marque à tout jamais.
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Descente aux enfers d'une jeune femme noire de Harlem dans les années 40.

Lutie Johnson est pourtant intelligente, ambitieuse et belle, très belle: trois qualités qui la perdront. Il aurait mieux valu qu'elle ne réfléchisse pas, qu'elle courbe l'échine et accepte sa condition. Etre Noir signifie : pas de travail pour les hommes, ménage, tâches avilissantes ou prostitution pour les femmes. Et un cercle vicieux de misère et de honte qui s'installe.

Les hommes, alors traînent chez eux ou dans la rue, boivent parfois, traficotent. Les femmes rentrent tard, épuisées, les couples s'étiolent, elles se retrouvent seules avec leurs enfants dont elles n'ont pas le temps de s'occuper alors ils rentrent seuls de l'école, ont peur du silence, traînent dans la rue, se font embrigader par de plus forts dans la délinquance, finissent en maison de correction avec un casier judiciaire qui les suivront toute leur vie.

Hors de question se dit et se répète sans cesse Lutie. Elle se promet un meilleur avenir pour elle et son fils. Cette rue dans laquelle ils viennent d'emménager n'est qu'une adresse temporaire: les enfants livrés à eux-mêmes renversent les poubelles, l'été on y dort dans la rue ou sur le perron mais l'hiver on y meurt de froid. Son immeuble n'est pas mieux: murs sales et délabrés, entremetteuse au premier étage qui relance sans cesse Lutie, et un concierge qui attend la bonne occasion pour lui sauter dessus.
Il se trouve que Lutie a eu la chance de travailler quelques temps auprès d'une famille blanche et riche et qu'elle n'acceptera pas que sa couleur de peau soit un obstacle à sa réussite.

On suit les pas de cette jeune femme courageuse en frémissant pour elle et on l'admire pour sa force de volonté, son refus obstiné de tout ce qui pourrait les avilir, elle et son fils. Pas question qu'il soit un petit cireur de chaussures, pourtant cet argent leur ferait tant de bien! Cet argent sans lequel rien n'est possible, qu'il serait si facile à gagner parce qu'elle belle, si séduisante...

Ce roman avait eu un énorme succès aux Etats-Unis quand il avait été publié, en 1946. Il s'agit ici d'une réédition de la collection Vintage Noir, de Belfond, après être passé inaperçu la première fois en 1948. Replacé dans son époque, c'est un morceau de bravoure pour une femme noire et un témoignage triste et révoltant de la condition de la communauté noire.
Tout au long du roman, on veut y croire et c'est là tout le talent d'Ann Petry.
Je remercie Babelio et Belfond pour ce roman dur et bouleversant.
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Voici un livre choc qui nous invite à partager, dans les années 40, le quotidien de la 116éme rue à Harlem, une rue réservée aux noirs, une rue pernicieuse, une rue "Où les gens étaient entassés comme des sardines dans une boîte ".

Des papiers de toute sorte l'envahissaient .
Elle était si mal orientée qu'il ne devait jamais avoir de soleil dans les appartements .........

Pouvait-on qualifier "d'appartements " dans cette rue noire et populeuse , des vieilles maisons aux fenêtres étroites ?Plutôt "de trous à rats ."........

Ces lieux sordides , loin de l'air et de la lumiére , confinés où la saleté, les immondices, les odeurs et les cafards abondaient ?
Une rue, dévoyée, synonyme de peur, de rejet, de violence et de dangers, d'espionnite aveugle, de haine, aux planchers dégoûtants , aux escaliers souvent couverts de mégots et de poussière .
C'est là que vivait la jeune et très jolie Lutie, lucide et courageuse, déterminée, Mère de Bub, un gamin de huit ans, séparée de son mari, pris en flagrant délit de tromperie, alors qu'elle travaillait pour gagner l'argent de la famille, chez des Blancs ...
Elle tentera de toutes ses forces de se battre avec intelligence, économie , honnêteté , courage , afin de s'extraire enfin de sa condition.

Elle travaille avec acharnement tout en vivant dans ce trou à rats, confiné, étroit , parquée dans cette petite surface , avec Bub, à la merci de la folie sexuelle du concierge et de ses envies , un certain Jones, furieux , violent , déchaîné , les yeux pleins de désir , qui tente de l'entraîner dans la cave, sauvée ni extremis de cette fureur inouïe , par madame Hedges, une tenancière de Bordel , au passé douloureux , toujours à sa fenêtre .......n'en disons pas plus!
Au sein de ce livre où l'impensable rejoint le sordide, l'auteur conte , avec une efficacité redoutable, une intelligence et une finesse rares, l'espèce de fatalité où les hommes et les femmes ne peuvent vivre dans la dignité sans échapper à la corruption , à des sursauts de violence et des haines inextinguibles .
Les femmes partout travaillaient pour entretenir leur famille, car, nulle part, les hommes ne trouvaient de travail..
Comme dans un cercle vicieux , ils s'ennuyaient, végétaient , sortaient , trafiquaient , les enfants restaient seuls.
C'est ce qui vieillissait prématurément les femmes : le poids écrasant du dur labeur quotidien .
Une peinture sombre, noire, poignante, bouleversante, réaliste, une analyse minutieuse et clairvoyante, qui arrache le coeur, dont on sort troublé et abasourdi, sans voix, ( comme dans les romans de la grande Toni-Morrison.)
L'exploration d'une misère sociale et humaine extrêmes, aux multiples facettes, où régnaient en maître le désarroi, l'amertume, la haine, la colère, la corruption,la fatigue , l'horreur insurmontable , l'envie, le fracas, l'horrible obsession de la chair !
Superbe , à lire sans rêver des caves ....



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J'ai découvert ce roman par hasard. Un achat impulsif encore !
On ne ressort pas indemne de ce genre d'ouvrage. On referme ce livre en éprouvant la rage au ventre, la haine contre l'injustice, la violence et la pauvreté.
Un roman noir qui me laissera une profonde cicatrice… Un dégoût contre l'homme blanc, moi qui suis si blanche…


Bonne lecture !
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Dans le Harlem des années 40, Luthie compte bien s'en sortir et offrir un avenir à son fils de 8 ans, autre que laveur de carreaux, cireur de chaussures, chômeur se cognant aux murs, à la rue.
Mais pour cela il faut éviter le piège de la pauvreté. Déménager de cet appartement dont les murs qui se referment sur eux, les obligeant à sortir dans la rue, pour échapper au silence oppressant, malgré la radio des voisins, et les voix qui traversent les cloisons. Quitter cette rue sale et sombre qui ne leur laisse aucune fenêtre vers un ciel plus clair, un air plus sain, une vie plus digne.
Luthie est courageuse, elle veut vaincre, ne pas se résoudre à la fatalité.

Peut-on s'en sortir quand on est noire, très belle, célibataire avec un enfant, avec les Blancs qui vous mettent des bâtons dans les roues ? Non seulement les Blancs, mais aussi les Noirs qui n'ont pas trouver d'autre issue, que celles d'exploiter les leurs, pour sauver leur peau.

La rue c'est un piège, celui de la pauvreté, la pauvreté qui colle à la peau, à la peau noire, comme une étiquette. La rue c'est un mur, qui empêche de voir le soleil, si haut, qu'on ne peut l'escalader. On ne peut que regarder à travers de petites brèches, la vie des Blancs. Des brèches pour les servir à table, recevoir leurs injures. Des portes de service à l'arrière de leurs cuisines, où les mamans triment sans pouvoir s'occuper de leurs gamins, les laissant à la rue, aux institutrices sans coeur, aux concierges pervers, à la solitude entre 4 murs, au chagrin, au destin.

L'écriture est remarquable. On entre dans la tête de Luthie, et de son petit garçon. On imagine l'escalier qui grimpe à l'appartement minuscule, la rue jonchée de détritus, la fatigue et le désespoir de la maman, les peurs de son fils.
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Lutie Johnson n'a qu'une idée en tête : l'avenir. Elle rêve de donner un avenir à son fils, Bub, et bien que la vie ne l'ait pas épargnée, elle est décidée à y parvenir, quitte à faire des sacrifices. La première étape consiste à quitter l'appartement qu'elle partage avec son père, un alcoolique notoire, et sa nouvelle compagne pour avoir son propre logement. Malheureusement, son budget lui impose des limites, elle devra donc s'installer dans la 116è rue de Harlem. La rue des noirs.

C'est un portrait sans concession de l'Amérique des années 40 que nous livre Ann Petry, un récit dur, brut, comme cette rue où blancs et noirs ne se fréquentent pas, ou les uns et les autres ne font que survivre. Luthie est amenée à y croiser une galerie de personnages ambigus, où la frontière entre le bien et le mal est ténue. le concierge et son regard vicieux porté par sa folie, Mrs Hedges qui passe son temps accoudée à son balcon à observer tout ce qui se passe dehors, tandis que ses filles apportent de la satisfaction à des hommes de passage, même des hommes blancs...

Luthie est un personnage fort, qui derrière les rêves frivoles dus à son âge, cache un être courageux, prêt à tout pour assurer l'avenir de Bub, son fils. A tout ? Non, pas exactement. Jamais elle ne se prostituera, jamais elle ne travaillera pour Mrs Hedges. Jamais elle ne fricotera avec ces blancs qui la regardent de haut, ces blancs qui la méprisent. Au fil des pages, elle se bat sans relâche et franchit les embûches, sans céder au découragement. le travail va payer, le travail sera l'ascenseur social dont elle rêve, et certainement pas sa beauté, comme le prétend Mrs Hedges. Oui, elle en est convaincue, le monde ne peut pas être si laid.

J'ai adoré ce roman pourtant sombre dans lequel luit malgré tout la flamme de l'espoir, celle de Luthie qui porte le récit. Les personnages sont très bien travaillés et m'ont fait ressentir une myriade d'émotions parfois contradictoires. Pour Mr Jones, le concierge, le verdict a été sans appel : du dégoût. Sa folie ne pouvait rien susciter d'autre. Mais pour Mrs Hedges, rien n'a été simple. Ce personnage m'a fascinée... Je n'ai pas réussi à trancher. Ordure ? Victime ? Difficile à dire, mais cette dualité résume à elle seule l'âpreté de ce récit et la violence de cette époque. Un petit bijou sur l'Amérique des années 40.
Lien : http://lelivrevie.blogspot.f..
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Années 40. Lutie Johnson est belle, travailleuse, intelligente, noire. Et déterminée : déterminée à ne pas accepter cette vie de misère réservée aux personnes comme elle, déterminée à sauver son fils Bub de la rue.
Cette rue de Harlem, la 116e dans laquelle elle vient d'emménager, sale, dangeuresue, grouillante.
Une rue peuplée de personnages forts : Mrs Hedge, mère maquerelle qui ne quitte pas sa fenêtre, Jones, l'inquiétant concierge, Boots le charmeur, et Junto, le maître des lieux.
La tension monte, implacable, oppressante, Lutie se bat coûte que coûte, héroïne inoubliable, d'une force inouïe, marquée par le malheur et la fatalité.

Ann Petry nous offre un grand roman : atypique, cru et sans illusion. Une écriture précise et choc qui nous fait vivre l'injustice, la colère, la rage contenue, la rage tout court et qui nous montre dans toute sa vérité les conditions de vie effroyable des afro-américains à cette époque.

Une lecture marquante, une très très belle découverte.
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Être une femme dans les années 40 n'est pas simple, mais être une femme, Noire, séparée avec un enfant, c'est la peine capitale !

Lutie Johnson, habite cette rue et a décidé de refuser la misère sociale, en mettant toutes les chances de son côté et de celui de son fils pour qu'il ne sombre pas dans la médiocrité inexorable vers laquelle la rue ne peut que l'attirer.

La rue, ce sont les trafics en tous genres, c'est la prostitution comme seul moyen d'avoir une vie descente, sans parler de respectable. Dans la rue d'Ann Petry, on ne vit pas, on survit. La vie de Lutie Johnson, c'est une lutte de tous les instants, une mission quasi-impossible, car elle a beau être à Harlem, entourée de noirs comme elle, on lui renvoie tout ce contre quoi elle lutte : l'image de la femme fragile, que tous les hommes, noirs ou blancs veulent mettre dans leur lit, la jalousie des femmes qui ne voient en elle qu'une rivale, pleine de beauté. Mais le plus grave reste le racisme ambiant qui réduit les afro-américains à des postes subalternes, sans aucun espoir de s'en sortir.

La rue, c'est nauséabond, sordide, violent, c'est tout ce que les noirs ont le droit d'avoir. La rue, c'est la haine que les blancs donnent aux noirs.

Publié en 1946, ce livre aurait dû se rapprocher le plus d'un roman historique, mais malheureusement, il reste terriblement actuel. À croire que rien n'a changé.

Ce livre est incroyable, car lors de sa publication, il a atteint le million d'exemplaires vendus, ce qui est un événement dans cette Amérique ségrégationniste. Il est d'une rare intensité sur la condition des Noirs, des pauvres et particulièrement des femmes noires confrontées à la misère.

À travers Luti, l'auteure aborde la rage face à l'injustice, le refus de la fatalité dans une Amérique blanche.

La plume est d'une beauté fulgurante, comme Luti, dont la beauté transfigure le récit. Un récit intemporel et d'une incroyable vérité, avec un final déchirant, et inattendu.
Lien : https://julitlesmots.com/202..
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