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Critique de jmb33320


« […] Edda s'empressera de trahir ses promesses, tout cela est couru d'avance, et c'est de bonne guerre, car ce qui importe, ce qui justifie toutes les trahisons, tous les parjures, c'est ceci : la mission d'Edda en ce monde est de répandre la seule loi qui vaille la peine d'être respectée, celle de son pays, celle qui devait prévaloir sur la Terre entière à la Renaissance. le Nouveau Monde appartient, par la grâce de la Terre sacrée, aux femmes. Il leur revient d'y faire régner leur volonté, d'établir une société qui les élève et relègue l'homme, par nature inférieur, au rang d'individu de second ordre. »

Ce Nouveau Monde, c'est celui qui a succédé au nôtre, cinq cents ans plus tôt, après une catastrophe probablement nucléaire. Les survivants ne sont qu'une poignée, retranchés dans des villes. Rapidement, on ne sait trop comment, les femmes ont pris le pouvoir aux hommes, rendus responsables de tous les maux de l'ancien monde. Tout le savoir ancien, et la littérature, n'ont pas été totalement perdus, grâce notamment aux livres, mais évidemment les sciences et techniques ont été réduites au plus simple.

Ce roman commence dans une île battue par les vents, au large de l'Ecosse. Alba, la Sybille, qui a autrefois été reine dans ce qui reste d'Edimbourg, a choisi de s'y retirer définitivement pour délivrer des oracles à qui est assez fou pour tenter d'aborder ce bout de terre, la plupart du temps pris dans les glaces, qui gagnent du terrain. Elle a beaucoup de choses à se reprocher.

Milo et Faith sont des nomades originaires de Grande-Bretagne. Ces Gypsies ont la particularité vivre des rapports plus égalitaires entre les sexes. Milo, alors qu'il était lui-même encore enfant, s'est beaucoup occupé de Faith, alors bébé, qui avait perdu ses parents. Ces deux-là sont vraiment liés, pour leur plus grand malheur. Même s'il n'y a pas de lien de parenté entre eux, cette proximité, presque incestueuse, est désapprouvée par les autres membres de leur compagnie. Ils seront contraints de se séparer. Des plaines immenses d'Europe de l'Est aux pays nordiques, où règne la terrible Edda, ils connaîtront mille épreuves.

Que de souffle dans ce roman étonnant ! Emmanuelle Pirotte, que je découvre, reprend les codes des épopées de Fantasy, ou des romans postapocalyptiques, mais les subvertit avec un très grand talent. Son écriture est absolument superbe, sans être précieuse.

Pour tout dire elle m'a fait grandement penser au meilleur d'Ursula K. Le Guin. Elle sait, comme elle, ralentir le temps de la narration, s'attacher à la psychologie des personnages, toujours profonds et contradictoires.

Il s'agit donc de fantasy – ou de postapo – atypique, qui pourrait ne pas convenir aux lecteurs qui n'aiment pas sortir des sentiers balisés. Pour ma part, j'ai été emporté par ce roman puissant, qui prend tout son temps, ce qui me plaît souvent. Au point de regretter une fin très concentrée, où les événements se succèdent à un rythme rapide.

Je remercie Babelio et les éditions le cherche midi – collection Cobra - pour cet envoi « masse critique » tout à fait étonnant.
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