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Citations sur Le coeur blanc (95)

On les paye à la tâche. C’est léger, des fleurs. Longues journées, chaleur sur la peau, les tilleuls bourdonnent des multitudes d’abeilles qui butinent. Les heures défilent, paisibles et lourdes. On ne les sent pas passer en haut de l’échelle, dans les cimes vrombissantes. Elle aperçoit le ciel au-travers des branches. Il se déploie jusqu’aux limites des crêtes que la chaleur trouble d’un halo diffus. Elle se dit, Oh, le ciel... et pousse un soupir de contentement. Jean la regarde. Ils se sourient. Ils s’offrent une cigarette parfois, des caramels achetés à l’épicerie du village, des cerises cueillies dans le verger voisin. La peau ferme et lisse résiste un instant avant de craquer doucement sous les dents. Le jus sucré et tiède emplit la bouche. C’est bon pour la soif. Transparence de l’été – cerises et carambars. Elle voudrait que ces journées passées dans les arbres polissent les angles de toutes choses, de ce qu’elle a connu et ce qu’elle a craint. Au loin un coq ne cesse d’appeler, on entend le premier grillon, le sanglot d’une tourterelle, le son de la source en contrebas...
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INCIPIT
Les champs étaient nus. Ils s’étendaient jusqu’aux sombres limites du ciel. Ahmed rentrait sur sa mobylette, le cou entre les épaules, un bonnet ramené bas sur les yeux, ses lourdes chaussures gorgées d’eau. Le fils du patron, un adolescent aux cils de jeune fille, n’avait pas détourné le jet du karcher quand il avait croisé Ahmed qui nettoyait la calibreuse à asperges. Sans un mot d’excuse, il avait continué, traçant son passage entre les Marocains qui charriaient les caisses. La fille aux cheveux rouges l’avait évité de justesse, si maigre et jeune la fille, ses traits creusés sous le mauvais néon, cet air inquiet, mais qu’est-ce qu’elle foutait là. Ils avaient travaillé encore longtemps dans les courants d’air et le froid du hangar, curé le sol, chargé les caisses enfin sur le camion. « Pouvez y aller. Demain six heures ! » Demain serait dimanche et c’était trop tard pour le pain. Mais allez, on a l’habitude, après huit ans à trimer sur leur terre, dans leurs champs, pour leur fric, pour sa croûte.
La fille, elle, rentrait dans une caravane abritée sous des cyprès. Trop fatiguée, envie de pleurer, bien sûr qu’elle n’était pas de taille parmi ces Marocains silencieux, courbés au-dessus des buttes, qui jamais ne cessaient d’avancer, et elle loin derrière qui tentait de les rattraper. Ça la tourmentait le jour et la nuit. Elle ne tiendrait pas la saison.
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Rosalinde aime les fruits orangés de l'hiver, translucides, gorgés de suc, qui font ployer les branches nues du plaqueminier.
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Alors je lui ai parlé de l'été, quand on marche, que l'on court dans les rues désertes comme un rat dans un labyrinthe, qu'on a tellement mal en dedans de cette exaspération folle, ce besoin déchirant d'un "plus" sous le ciel aveugle et béant, et rien qui jamais ne vient, rien rien rien qu'un désir de plus en plus dévorant, une faim qui vous mord les entrailles, vous bouffe le coeur et l'âme.
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Les pierres roulent sous nos pieds, chevilles agiles qui plient et se tordent, résistent à la torsion, terre sèche qui s'éboule et cède, moi qui tiens bon, moi qui ris, moi qui tombe, moi qui grimace et qui retiens mes larmes et pourtant elles débordent, moi qui me mords rageusement la lèvre, moi qui me relève et qui ris et qui cours, je suis Mounia l'infatigable, Mounia l'ardente. Je suis Mounia l'été.
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Allongée sur la roche j'ai ri. Si elle savait combien j'aimais l'odeur de pain chaud des hommes, au gros du travail, l'odeur de ce pain que cuisait ma mère. Et ce voile de sueur sur le grain de leur peau, un suc qui me donne toujours envie d'y poser ma langue pour en sentir le goût salé, lécher passionnément comme une brebis captivée par la pierre à sel.
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Je déplace mes reins sur la pierre chaude. C'est brûlant et délicieux. Je réfléchis un instant - Pour moi ce qui est bon c'est le soleil. Quand j'entre dans l'été comme dans la passion et les bras d'un amant furieux.
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Je me sens nue l'été, Rosa. J'ai toujours l'impression d'être nue sous le regard des hommes, enfermée dans mon corps comme sur une île déserte. Peuplée de fauves qui me guettent et pourraient me dévorer. Ça me rend coupable et mal à l'aise.
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Oui le travail, et encore le travail, et encore les bars, et encore les hommes... elle a continué à mi-voix, et l'on va tourner de plus en plus vite. De toute façon on ne peut pas s'arrêter, on aurait bien trop peur de mourir si l'on s'arrêtait.
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Tu sais Mounia je pense parfois que les saisonniers, on est des anciens combattants. On cherche le feu d'un combat, on en charrie surtout le manque parce que le plus fou c'est qu'on n'a pas combattu. Enfin pas pour de bon.
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