Une colère, une colère abyssale et noire, dont je ne parvenais pas à me défaire. Impossible de l’extirper. Et qui grandissait, grandissait jusqu’à prendre toute la place, jusqu’à ce que je n’aie plus qu’elle en-moi. « Va à Raxter, a dit ma mère. Prend un nouveau départ. » Et j’ai essayé. Mais nous avons tous des talents cachés…
- Allez vas-y, m'a dit Byatt. Monte sur le guidon.
- C'est dans les films qu'on fait ça.
Mais j'ai enjambé la roue et je me suis délicatement assise sur mon perchoir.
Il commençait à faire jour plus tard le soir et, avec la surface miroitante de l'océan qui se reflétait jusque dans les terres, quand on a descendu la route, il y avait du soleil partout. J'aurais voulu être la fille qui ferme les yeux et renverse la tête en arrière. En fait, j'ai supplié Byatt de ralentir.
C'est juste un truc à elle. Et je ne sais même pas ce que c'est, en fait, juste que c'est là et que, quand elle s'en va, elle l'emporte avec elle.
Mais cette fille, cette Reese en face de moi, là, elle est complètement fracassée, en miettes. La tête fêlée, le coeur pulvérisé.
On a toutes les mêmes horreurs dans le corps, les mêmes supplices à endurer, les mêmes manques.
Je n’ai jamais eu peur du noir avant Raxter. Mais, ici, c’est différent. Ici, l’obscurité paraît vivante.
On est ici pour le restant de nos jours, et le restant de nos jours, c’est maintenant.
On est ici pour le restant de nos jours, et le restant de nos jours, c'est maintenant.
Certains jours, ça va. D'autres, ça me détruit. Cet horizon toujours vide, cette faim qui me ronge de l'intérieur, et comment on va réussir à survivre si on s'entretue, si on n'arrive même pas à vivre ensemble?
Un couteau à ma ceinture et un fusil entre mes mains. Un an et demi de ciel vide, de pénurie de médicaments, de corps brûlant derrière l'école. A nous de nous prendre en charge nous-mêmes. Aide-toi, le ciel t'aidera.