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Critique de Nastasia-B


Lorsque j'étais étudiante, période où j'ai commis l'insigne erreur de travailler beaucoup et de profiter fort peu de cette tranche de ma vie, il m'arrivait parfois — peu souvent, trop peu souvent — de m'octroyer une menue distraction, entre deux articles gorgés d'équations et de données statistiques, en lisant de ces choses si peu académiques, ces divertissants poly-picturo-scriptogrammes réticulés, qu'on nomme — quand on n'est pas scientifique — des BD.
C'est ainsi qu'au fond d'une chambre U plus sombre que l'âme torturée de Judas un soir de sinistre mémoire, j'ai découvert puis dévoré toute la série — ou peu s'en faut — des Corto Maltese, qui me permis de voyager moindrement, par procuration, cloîtrée que j'étais dans mes 9 mètres carrés réglementaires.
Tango n'est pas mon album préféré de Corto Maltese car je place avant La Maison Dorée de Samarkand et Corto En Sibérie, mais il vient par ordre de préférence juste après ces deux-là. C'est donc, à mon sens un très bon album.
Il y a une ambiance dans cette BD, quelque chose de pesant et d'angoissant comme un thriller. Corto, pour ceux qui ne le connaîtraient pas, est un personnage hautement ambigu, énigmatique, pas spécialement attachant, pince sans rire, peu loquace, qui met toujours son grain de sel là où il ne faudrait pas et qui possède un chic certain pour se mettre dans des situations scabreuses.
Sa marque de fabrique, c'est son absence de dogmes, il ne juge pas, il n'est ni bon ni mauvais, il sait être les deux. On peut juste préciser qu'il est fidèle en amitié, mais constamment fuyant.
Corto papillonne dans l'existence et n'hésite pas à se colleter à toutes les réalités historiques locales, belles ou non, il se place en observateur du monde.
Ici, il arrive en Argentine en 1923, après une quinzaine d'années d'absence, pour y retrouver Louise Brookszowyc, une prostituée juive dont il avait fait la connaissance à Venise (voir l'album Fable de Venise) et qui lui a écrit dans une lettre de la rejoindre.
Retrouver Louise va s'avérer bien plus difficile que prévu car le milieu glauque où elle évolue, celui de la prostitution organisée à l'échelon international, notamment par la filière polonaise n'aime pas spécialement les marins qui viennent fouiner et poser des questions sur des juives récalcitrantes.
La police locale n'est pas très claire non plus dans cette aventure. Mais quel est ce secret qui semble se dissiper dès qu'on croit l'avoir sous la main ?
Beaucoup de gens savent beaucoup de choses et ont des intérêts très contradictoires. Il est également question de grands propriétaires terriens de Patagonie avec des intérêts très haut placés. Il est même question des grands desperados américains que tout le monde croit disparus, j'ai nommé, Butch Cassidy et Sundance Kid.
Ce que j'aime dans les albums d'Hugo Pratt, c'est à la fois le côté très documenté, qui nous invite à aller nous renseigner sur ce qui a réellement existé, et à la fois, le côté complètement fictionnel, imaginatif, non cartésien, ésotérique de ses aventures. Un subtil mélange qui ne fonctionne pas forcément dans tous les albums, ici, c'est plutôt très réussi à mon goût.
Le côté « aventures » est moins présent qu'à l'accoutumée mais en revanche le côté thriller est parfaitement enclenché.
Bref, un bon album de Corto Maltese, dépaysant comme je les aime, mais ce n'est bien évidemment que mon avis, c'est-à-dire, bien peu de chose.
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