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Critique de Parisianne


Alors que l'on célébrera le centième anniversaire de la parution du côté de chez Swann chez Grasset, le 14 novembre prochain, une correspondance inédite de Marcel Proust avec sa voisine, Madame Williams vient de sortir chez Gallimard.

Un joli petit livret, comme savent l'être les livres de Gallimard avec leur couverture sobre, un format intéressant, un beau papier avec des reproductions fac simile des lettres manuscrites et quelques photos pour illustrer le tout, voilà qui paraissait séduisant. L'avant-propos de Jean-Yves Tadié, et les annotations de ce dernier en collaboration avec Estelle Gaudry, ont achevé de me convaincre.

C'est donc avec une certaine déception que je ferme ce livre qui, s'il est intéressant par certains côtés, notamment les qualités d'écriture, ne m'a pas semblé d'un intérêt fondamental.

Il est vrai qu'une correspondance à une seule voix manque nécessairement d'écho mais j'aurais aimé peut-être plus de profondeur dans ces lettres et si je les trouve, pour certaines, intelligentes, j'ai l'impression que seules les récriminations éternelles de Marcel Proust contre le bruit me resteront de cette lecture. Rappelons que Marcel Proust souffre s'asthme et de troubles du sommeil !

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Nous devons être en 1908 - les lettres ne sont pas datées - Proust demeure alors au 102 boulevard Haussmann, à Paris. Marcel Proust est au 2e étage, Madame Williams occupe le 3e étage, et son mari, le Docteur Williams, a son cabinet dentaire attenant, ce qui ne manquait pas de causer de nombreux soucis au pauvre Marcel, malade, et craignant fort le bruit.

Le ton des lettres est toujours emprunt d'une grande délicatesse à l'égard de la dame dont il s'enquiert de la santé fragile, la sienne mais aussi celle de son fils et livre un art du compliment "Madame, Par une grâce de générosité - ou un jeu de reflets - vous prêtez à mes lettres un peu des qualités qu'ont les vôtres. Les vôtres sont délicieuses, délicieuses de coeur, d'esprit, de style, de "talent". " (les guillemets à talent ne sont pas de moi mais bien de Proust lui-même ! " Puisse mon livre vous avoir donné autant de plaisir que j'en ai eu à lire votre lettre. " ou encore " Pardonnez-moi de ne pas vous avoir encore remerciée : c'est moi qui ai reçu de merveilleuses roses décrites par vous au "parfum impérissable" mais varié qui fait se succéder, dans les évocations du vrai poète que vous êtes, toutes les heures du jour, l'infiltration de l'arôme dans le clair obscur agatisé des "Intérieurs" ou son expansion dans l'atmosphère fluente et diluée des jardins. "

Même les récriminations sont joliment tournées "J'avais commandé pour vous ces fleurs et je suis désespéré qu'elles arrivent un jour ou contre toute prévision je me sens si mal que je voudrais vous demander du silence pour demain samedi. Or cette prière n'étant nullement conjuguée avec les fleurs, et leur faisant perdre tout leur parfum d'hommage désintéressé et les hérissant de mauvaises épines, j'aime encore mieux ne pas vous demander ce silence. "

Cette correspondance ne manque donc pas d'élégance bien sûr, et offre aussi d'intéressants éclairages sur l'oeuvre de Proust " La suite de Swann (si j'ai bien compris) ? ou bien Swann ? Si c'est la suite, il n'y a que les Extraits, fort longs il est vrai, du 2e volume, parus dans la Nouvelle Revue Française. La Guerre est arrivée, le 2e et le 3e volume n'ont pu paraître, naturellement. J'ai des amis qui continuent à faire des livres, et à en publier, puisqu'ils me les envoient. Sans doute leur éditeur n'est pas mobilisé comme le mien, leur pensée n'est pas mobilisée comme la mienne qui en fait d'"épreuves" en ce moment est tournée vers d'autres que celles qu'il me faut corriger. "

D'autres éclairages également sur les inquiétudes qu'il nourrit pour son frère et ses amis au front ou encore son propre ajournement pour raison de santé. Donc, comme je le disais pour commencer, des documents certes intéressants mais qui m'ont paru plus fades que le Mensuel retrouvé, série d'articles inédits du jeune Proust parus aux Editions des Buclats l'an dernier dans lesquels l'esprit et la fine observation de ses contemporains qui nourriront son oeuvre apparaissent déjà de façon manifeste.

Malgré tout, une forte envie de retourner A la recherche du temps perdu, abandonnée en cours de route il y a quelques années...
Lien : http://parisiannemusarde.ove..
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