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Critique de patatipatata


Pascal Quignard, en véritable passeur, nous transporte dans sa barque silencieuse du royaume des vivants vers le royaume des morts ; de la lumière vacillante d'une chandelle vers les ténèbres insondables qui dévorent le cadre des peintures de Georges de la Latour.

A la façon du Caravage, La Tour fait tomber les auréoles. «Les dieux sont sans nimbes, les anges sont sans ailes, les fantômes sans ombre.» L'ordinaire devient sacré. «toute femme devient Marie». «A la fois elles font du Mystère la chose la plus domestique et elles rendent subitement solennelles les molécules de la condition humaine : naissance, séparation, sexualité, abandon, silence, angoisse, mort.»

Le regard sensible de Pascal Quignard pointe certains détails des oeuvres qui nous incitent à nous interroger avec lui.
«Dans le Songe de Saint Joseph» Pascal Quignard observe que «la main (de l'enfant) tendue ne touche pas encore le poignet du vieillard. Cette main, curieusement, ne porte pas d'ombre sur la poitrine du dormeur. Les fantômes sont reconnaissables à l'impuissance où sont leurs corps disparus de porter une ombre sur les choses.»
C'est magnifiquement dit et bien observé mais je m'interroge. Et si cette absence d'ombre avait pour but de concentrer notre regard sur une autre ombre ; celle des ciseaux projetée sur la table ; le ciseau de la Parque Atropos qui coupait le fil de la vie.
Un autre détail m'intrigue. La main gauche de l'enfant suspendue dans l'air, paume tournée vers le haut, doigts fléchis. On a l'impression que cette main est en attente de recevoir quelque chose. Serait-il alors possible de penser, si on prend en compte toute la composition, de voir les bras de l'enfant comme un mouvement de balancier arrêté ; une main en plateau ; suspendue dans l'air, en attente, pour la pesée de l'âme.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Fichier:Georges_de_La_Tour_022.jpg

Des fils, des vies, Pascal Quignard en entrecroise plusieurs. Des bords obscurs des peintures de Georges de la Tour, il fait surgir le chant des Leçons de Ténèbres de Couperin, la parole de Jacques Esprit, celle de Saint Jean de la Croix, la guerre de 30 ans, la peste, les incendies, les tableaux brûlés ; la vie d' «un homme aussi violent que fier. Sans charité» qui produisit entre quatre cents et cinq cents toiles dont il ne reste que vingt-trois originaux, trois gravures et deux lettres.
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