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Critique de kuroineko


Les Imperfectionnistes m'a été chaudement recommandé par mon libraire qui, une fois de plus, a eu raison de le faire (aussi éclectiques soient-ils, il connaît bien mes goûts... peut-être le signe que j'y vais trop souvent; fermons la parenthèse).

Sous la forme de portraits successifs, Tom Rachman raconte la vie de onze intervenants dans la vie d'un quotidien international de langue anglaise, sis à Rome. Entre, s'intercale le récit du journal proprement dit depuis sa création par l'homme d'affaires américain Cyrus Ott et sa gestion et son maintien en dents de scie par ses successeurs.

Dans la galerie des employés, on trouve un correspondant à Paris au bout du rouleau, le rédacteur de la rubrique nécrologique face à un drame personnel qui le métamorphose du tout au tout, une rédactrice en chef ambitieuse, dynamique et autoritaire, un pigiste néophyte au Caire qui ne connaît rien au journalisme, est diplômé de primatologie, ne parle pas arabe et se retrouve aux prises avec un vieux routard du reportage sans gêne et horripilant au possible. Et d'autres, DRH chargée de faire tomber les têtes par mesure d'économie, une fidèle lectrice qui lit le journal avec tellement de méticulosité que fin 2006, elle en est au 23 avril 1994 et découvre les massacres au Rwanda...
Si l'auteur met une touche d'ironie dans la plupart de ses portraits, c'est surtout l'amertume qui reste en bouche en fin de lecture. Amertume de vies consacrées à faire vivre ce petit journal, parfois au détriment de son couple, désillusion des années défilant, amertume d'ouvrir les yeux sur certains aspects de son existence qu'il aurait mieux valu ne pas voir. Parfois la lucidité, même recherchée, voire exigée, fait plus souffrir qu'autre chose.

Sans tomber dans une sinistrose intégrale - merci le zeste d'ironie et la présence de quelques scènes cocasses - Les Imperfectionnistes n'est pas pour autant un livre qui ravigote un moral en berne. Ce qui n'empêche la qualité de narration et le talent de l'auteur à brosser des portraits crédibles et tous incarnés. C'est également un demi-siècle d'histoire du journalisme à travers ce petit quotidien, avec tous les bouleversements survenus dans le métier. A commencer par les changements technologiques : passage de la machine à écrire à l'ordinateur, concurrence de la télévision et des chaînes d'infos en continu, énorme claque avec l'arrivée d'Internet et la question digne d'Hamlet : être ou ne pas être sur le Net?
C'est aussi la vie au jour le jour du journalisme : rédaction, corrections, bouclage, impression, recherche d'un bon sujet ou - Graal - d'un scoop, les complaintes financières, etc.

En conclusion, ce roman est une réussite, se maintenant un équilibre tout du long. On s'attache aux personnages en observant leur face publique / face cachée, leur mesquinerie, leur pathétique, leurs failles et leur tendresse. Pas toujours très gai mais à l'image de la vie qui est rarement un chemin parsemé de pétales de roses.
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