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Critique de Williamine


C'est le premier roman de C. F. Ramuz que je lis, conseillé par un ami babéliote, et ce fut un véritable choc littéraire.
Le titre 'Présence de la mort' surprend tout d'abord le lecteur, tellement plus radical et sans appel que ne l'aurait été 'Disparition (ou absence) de la vie'. Et toute la force du roman s'exprime dans ces quelques mots.
Présence de la mort est l'histoire d'une apocalypse moderne. Une catastrophe naturelle est en train d'anéantir la terre et tous ses occupants qui vont tous rapidement périr sous une chaleur infernale. Tout semble fondre, se consumer, s'évaporer. L'air change de couleur, de densité et devient opaque. La lumière devient blanche et crue. L'eau s'épaissit et bouillonne. Les arbres perdent leurs feuilles et sèchent sur pied. Les constructions gémissent avant de s'écrouler sur leurs habitants. La terre se fronce avant de se creuser et d'engloutir les chemins et les routes.
L'histoire se passe en Suisse, dans une région de montagne qu'on aurait pu croire à l'abri, pour un temps tout au moins. Et chaque chapitre est l'occasion pour le lecteur de vivre (ou mourir) la venue de l'apocalypse aux côtés d'un nouveau personnage. Toutes les catégories sociales, les métiers, les sexes, les âges sont touchés, pas de merci ! Et lorsque la mort approche, c'est chacun pour soi. Après un moment d'incrédulité, les hommes comprennent qu'ils vont mourir et font tout pour retarder l'échéance, même au prix de la vie des autres. Une guerre civile éclate qui déborde rapidement l'armée et les pouvoirs publics. Les classes les plus défavorisées voient dans cette période où les barrières tombent une autorisation de faire la révolution. Mais ce ne sera que de courte durée puisque les hommes seront aussi égaux dans la mort.
Cette histoire, qui sous la plume d'un autre écrivain aurait pu ressembler à un roman catastrophe et d'anticipation classique prend un tout autre relief dans l'univers littéraire extraordinaire de Ramuz.
En effet, l'écriture de Ramuz ne ressemble à rien de ce que j'avais lu jusqu'alors. Chaque événement, chaque description fait éclater une constellation d'images mentales, toutes très belles et poétiques, même s'il s'agit de scènes apocalyptiques. le lecteur est comme projeté dans une autre dimension aux côtés des différents personnages qui sont en train de vivre leurs derniers moments.
Le récit est sous-tendu par une réflexion constante sur la mort, le sens de la vie. A tout moment, le lecteur est conduit à se demander s'il a bien vécu, si sa vie valait la peine, s'il n'a pas perdu de temps et s'il ne doit pas se hâter de rattraper ce qu'il peut sur le temps qui lui reste.
Enfin bien sûr, Présence de la mort illustre l'incapacité de l'homme à savoir qu'il va mourir. La mort reste, presque jusqu'à ses derniers instants, une vague idée, une hypothèse à laquelle il ne croit pas vraiment, ou refuse de croire. Mais le titre du roman est là pour lui rappeler que la Mort est là …
Une lecture qui résonne longuement en nous et que je conseille vivement !
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