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Critique de Cannetille


Le Shérif Les s'apprête à prendre sa retraite dans les prochaines semaines, lorsqu'une dernière affaire vient bousculer ses préparatifs de départ : Gerald, un vieil homme du coin, dur-à-cuir irascible viscéralement attaché à ce coin de nature des Appalaches, refuse de respecter l'interdiction d'accès à la rivière, légalement décrétée par le propriétaire d'un tout récent et luxueux relais de pêche pour riches touristes. La dispute de voisinage s'envenime lorsque la rivière est soudain polluée par un déversement de kérosène, et que tout semble, bien trop facilement, accuser le vieillard.


Sur l'insistance de Becky, la directrice du Creek Park qui a fait de la protection de la nature sa raison de vivre et qui partage avec Gerald sa passion pour ce lieu, Les entreprend de soulever le drap des apparences pour innocenter leur ami.


Les est de l'ancienne école et a depuis longtemps appris à jouer son rôle avec discernement, quitte à appliquer parfois ses propres méthodes, celles qu'il juge plus aptes à remettre ses concitoyens sur les rails, lorsque le malheur ou la pauvreté les a envoyés dans le mur. Pas facile en effet de rester de marbre face aux fréquents drames du désespoir qui frappent ce district rural et déshérité, où l'addiction à la méthadone fait des ravages. Il semble qu'aucun des personnages ne soit indemne : tous ont gardé des traces psychologiques et affectives des épreuves qu'ils ont vécues. Ce sont ces failles qui leur donnent tant d'humanité, dans ce roman qui parvient à rendre toute leur profondeur et leur complexité.


Au travers de ce qui n'est finalement qu'un fait divers, cette histoire met en scène la confrontation entre un mode de vie traditionnel, pauvre mais proche de la nature, et celui, plus bling bling, de sa transformation moderne motivée par le profit. Ici un promoteur s'empare d'un coin de nature pour l'encager dans les frontières d'une propriété privée réservée à une clientèle payante. Là, le départ en retraite de Les marque la fin d'une humanité professionnelle et son remplacement par l'efficacité toute neuve et toute réglementaire de son successeur.


Rien n'est ici manichéen, tout n'est que nuance et subtilité dans la restitution tant des caractères que de leur environnement. Le propre attachement de l'auteur pour cette région transpire à chaque page, en particulier chaque fois que Becky vient chercher l'apaisement au contact de la beauté sauvage du parc naturel dont elle a la garde. Ses envolées lyriques m'ont toutefois laissée un peu sur la réserve : sans doute vaut-il mieux apprécier ces poèmes dans leur langue d'origine, ce qui m'amène à saluer au passage le travail de la traductrice, dont ils ont dû sérieusement compliquer la tâche.


Ce roman est au final une oeuvre aux multiples facettes, où l'enquête policière n'est que le miroitement en surface de complexités humaines suggérées avec sensibilité, poésie et une forte pincée de nature-writing.


Prolongation sur le petrichor mentionné dans le livre, dans la rubrique le coin des curieux, en bas de ma chronique sur ce roman, sur mon blog :
https://leslecturesdecannetille.blogspot.com/2019/05/rash-ron-un-silence-brutal.html

Lien : https://leslecturesdecanneti..
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