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Critique de sylviedoc


A nouveau, comme avec "L'empathie" du même auteur, j'ai du mal à pondre un retour parce que j'éprouve des sentiments assez ambivalents après ma lecture. d'ailleurs je l'ai terminé il y a déjà un certain temps, et j'ai enchaîné plusieurs lectures très différentes depuis, histoire de me défaire de cette ambiance malaisante qui suinte dans le roman.

Deux histoires, l'une qui s'étire sur de longues années de captivité pour la jeune Ambre, et l'autre qui commence plus tard avec Arthur qui traverse une mauvaise passe et se voit forcé d'accepter un boulot alimentaire, modérateur de contenus internet pour un sous-traitant de Lifebook (jumeau littéraire de facebook).

Ambre était une adepte des échanges sur le réseau, elle y passait des heures à discuter avec Baptiste, lui confiant tous ses secrets. Et le jour où elle se prend trop la tête avec sa mère, elle persuade son petit ami Adrien de fuguer avec elle et d'aller se réfugier dans le midi chez Baptiste. Très mal leur en a pris. Parce que si Baptiste sait tout d'elle, en revanche elle ne sait rien de lui.

De son côté, Arthur a réalisé deux films qui n'ont pas trop marché, mauvais timing, pas de chance. En plus, sa femme le trompe, mais c'est elle qui le fout à la porte après 20 ans de vie commune sans nuages, du moins c'est ce qu'il,pensait. le voilà obligé d'accepter ce travail de "modo", qu'un ami de son frère lui a dégotté. J'ai vu un reportage sur la réalité de ce boulot, croyez-moi je ne voudrais pas le faire pour tout l'or du monde. Et ce n'est certainement ce roman qui me fera changer d'avis, parce qu'Antoine Renand n'épargne rien au lecteur, on a droit à la description de toutes les turpitudes que des tordus se plaisent à filmer et diffuser sur le net.

Du côté d'Ambre, séquestrée par Baptiste, ce n'est guère mieux, car lui aussi coche toutes les cases du parfait psychopathe. Cependant, curieusement j'ai éprouvé moins d'empathie pour Ambre, même si son sort est objectivement bien plus terrible. Peut-être ai-je trouvé qu'elle avait une attitude parfois trop ambivalente vis-à-vis de son ravisseur (alors qu'elle se défend à plusieurs reprises d'éprouver le fameux syndrôme de Stockholm)

Bref, cette lecture a finalement été moins malaisante pour moi que "L'empathie", mais elle m'a confortée dans mon aversion pour les dérives induites par certains réseaux sociaux, qui ne font hélas qu'empirer au fil des années. Et ceci a des conséquences de plus en plus néfastes sur les cerveaux malléables de nos ados, dont certains sont totalement sous emprise et reproduisent par exemple ces challenges idiots et dangereux fleurissants sur le web. Et que dire de ces individus qui filment ou se filment torturant des êtres humains ou des animaux ? Et ceux qui regardent avidement, par quoi sont-ils motivés ? leur envie de faire pareil sans en avoir "le courage" ? Que peuvent faire ces malheureux modérateurs obligés d'ingurgiter chaque jour des heures de visionnage d'horreurs, à part cliquer sur "supprimer" ? Acte qui ne supprimera que les images, provisoirement la plupart du temps, mais pas les actes qui sont derrière.

C'est justement la question qui taraude Arthur et quelques-uns de ses compagnons de galère, et qui sans doute vous travaillera aussi, si vous lisez ce livre. Comment enrayer cette terrible exhibition de violence, et ne pas juste mettre la tête dans le sable. Comment sensibiliser les jeunes et les inciter à ne pas cautionner les contenus violents ou potentiellements dangereux ? C'est l'une des tâches que nous nous efforçons de mener, dans les collèges et les lycées. Mais hélas, c'est comme une hydre dont les têtes repoussent sans cesse, et il suffit d'écouter les infos pour constater que nous vivons dans un monde de plus en plus terrifiant. Nous en avons eu un nouvel exemple hier soir, avec l'assassinat de Dominique Bernard, ce prof qui voulait juste protéger ses élèves d'un jeune fanatisé. Et comment se fait la propagation des idéologies radicales auprès des jeunes, et leur recrutement : bien souvent par les réseaux sociaux. Pas toujours, certes, et je ne cherche pas à les diaboliser, mais il faudrait que les états agissent de façon plus efficace pour bloquer la propagation des contenus néfastes, et rechercher leurs auteurs pour les sanctionner. Ce ne sont pas les "modos" comme ceux du roman qui peuvent faire quoi que ce soit, parce que justement, on ne vit pas dans un roman...

Voilà, c'était l'heure de la petite diatribe, désolée je me suis un peu éloignée de la stricte critique du roman, mais j'avais envie (besoin même) d'exprimer mon ressenti au-delà de l'histoire. Merci de m'avoir lu, si vous êtes allés jusqu'ici !
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