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Critique de maevedefrance


Il y a une date qui se répète comme un mantra dans ce roman : 12 avril. Une date qui ne vous dit probablement rien, mais que vous ne pourrez plus jamais oublier une fois que vous aurez lu ce livre.

Le 12 avril 1961 est la date du premier vol spatial habité de l'histoire de l'Humanité. Un "vol de 108 minutes dont 90 minutes en orbite au-dessus de la terre". Et un vol russe, en pleine guerre froide. le secret défense fut gardé pendant 30 ans avant d'être levé par le directeur du Centre scientifique fédéral de documentation cosmique, Anastase Jiglov, à l'occasion de l'anniversaire du vol.

Le 12 avril 1961, c'est un certain Youri Gagarine qui part tutoyer les étoiles à bord de sa fusée Vostok. Youri Gagarine, un nom qui ne dira sans doute rien aux plus jeunes et peut-être même aux plus si jeunes. Un nom tombé dans les oubliettes de l'Histoire.

Anne-Marie Revol propose un portrait en kaléidoscope de ce héros par son exploit, mais qui n'en demeure pas moins un homme. Elle laisse la parole à dix personnages à chaque date anniversaire. Un voyage spatio-temporel qui vous fera voyager des Etats-Unis, à l'URSS, en passant par la France. Un roman à l'image des poupées russes qui s'emboitent pour donner à voir un portrait complet de Youri Gagarine, entre réalité et fantasme.

L'émotion, empreinte de colère d'un grand-père soviétique émigré aux Etats-Unis, qui assiste à la vente aux enchères du Vostok en 2011, lui qui a connu la guerre des étoiles alors que son petit-fils est scotché à une guerre des étoiles électronique sur sa Game Boy.

"La personne qui achètera cette capsule aura du mal à la caser dans son salon entre une télé et un buffet. J'espère qu'elle aura la délicatesse d'en faire don au Pavillon du Cosmos à Moscou. Ca fait trop longtemps qu'elle est entre des mains étrangères. D'Ailleurs, je me demande bien quand elle a pu quitter le territoire soviétique. Elle a dû être vendue au marché noir ou piquée par des crapules au début de la Perestroïka. le bordel qu'a foutu Gorbatchev en prenant le pouvoir était surréaliste !"

La surprise d'Anna Akimovna Takhtarova une paysanne qui voit tomber un homme du ciel, à quelques pas de sa isba. Ne sachant pas trop si c'est du lard ou du Martien...

"Je suis folle. Je ne sais plus quoi dire. Quoi faire. Ni quoi penser. (....)
Pour sortir, j'ai boutonné ma blouse et roulé mes bas. Jusqu'au dessous de mes genoux. (...) On avait des patates à planter.
C'est là que c'est arrivée... ou, pour être plus précise, qu'il est arrivé..."
(Je n'en dit pas plus, je ne vais pas vous spoiler cette histoire savoureuse et drôle !)

Une interprète qui fut aussi la femme d'une nuit parmi d'autres du cosmonaute ; une journaliste du nom de Marina Balleroy - ma curiosité a été piquée mais je n'ai rien trouvé sur internet ! :) - qui écrit un article sur l'enfance de Gagarine pour France Observateur au même moment où son arrogant voisin américain nommé John Carter-Hill décide de lui rejouer la guerre des étoiles dans la cour de la Villa de l'Adour.
"Marina s'assoupit sur son lit en essayant de lire Paris est une fête."

Les extraits du journal intime de Valia, la veuve de Youri Gagarine vient rappeler qu'on peut être un héros mais se tuer bêtement :

"Mourir à trente-quatre ans, dans un banal accident d'avion, quand on a bravé les entraînements, Kamanine et l'atmosphère terrestre, ça n'a pas de sens ! Si seulement tu n'avais pas été aussi pauvre, aussi simple, aussi entier, aussi beau, aussi petit, aussi déterminé. Si seulement je t'avais encouragé à redevenir fondeur.
Le monde entier porte ton deuil. le deuil d'une idole. D'une icône. D'un demi-dieu. Qui connaît le Youri véritable ? Celui qui n'a jamais su faire cuire un oeuf à la coque, l'adepte des batailles de boules de neige en ordre rangé, le leader de la cage d'escalier capable de faire courir tous les hommes de notre immeuble par -10°? l'amateur de blagues potaches, de saké chaud et des complaintes de Vyssotski."

Ainsi naissent les étoiles...

En tout cas, le voyage spatial tiré du carnet de bord de Youri Gagarine a été un beau moment d'émotion et l'occasion de se rendre compte du courage qu'il a fallu à cet homme pour se lancer dans cette aventure au-delà de la manipulation médiatique des dirigeants du Parti pour en faire le héros idéal.

Un roman où l'on sent un travail de journaliste pointer derrière ce portrait croisé, à la fois drôle, émouvant, érudit mais jamais ennuyeux ! La plume dynamique d'Anne-Marie Revol vous emporte loin. Un chouette moment de lecture !
Lien : http://milleetunelecturesdem..
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