AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de TRIEB


L'Allemagne s'est-elle suicidée, gravement mutilée pendant la période nazie ? Dans son essai intitulé le suicide de l'Allemagne » et sous-titré Sur le Moïse de Thomas Mann, Jean-Michel Rey apporte des éléments de réponse : c'est à l'occasion de la publication d'une longue nouvelle « La Loi » aux Etats-Unis en 1943 durant son exil, que l'écrivain cerne le rôle de Moïse comme prophète bien sûr, mais aussi comme initiateur de la fabrication du peuple juif .Pour lui, « Moïse est un sculpteur, au sens métaphorique, il est celui qui taille et dégrossit un bloc réfractaire dont il va tirer, par un travail obstiné, une création originale, ce qui va s'appeler le peuple juif ». Par ailleurs, l'inscription des Tables de la Loi, gravées en lettres de sang par le prophète permet à ce dernier de souligner la portée de ces nouvelles Tables, de les faire équivaloir à une « parole pour tous ».Elles représenteront le repère autour duquel se situera l'humanité.
A partir de là, Thomas Mann se demande pourquoi des écrivains comme Heinrich Heine, Nietzche, qui ont mis en garde en leur temps contre la tentation d'expulser la part juive de la culture allemande, n'ont pas été entendus : « Chez les Allemands la question de savoir « ce qui est allemand » reste toujours d'actualité et c'est là un trait typique. », écrit Heinrich Heine.
Pour Thomas Mann, le corps allemand est en quelque sorte dévitalisé, il est amputé de sa part juive qu'avait voulu introduire Moïse en tant que diffuseur initial de la Loi suprême. La langue allemande, selon l'auteur de Joseph et ses Frères, a été pervertie, avilie par la terminologie nazie et la signification répulsive qu'ont revêtu certains mots .La langue est « contaminée de fond en comble, le discours fortement dévoyé, la syntaxe prise au sens le plus rudimentaire, les mots réduits à l'univocité, voire au slogan. » Bien d'autres aspects de ce suicide culturel sont abordés dans l'essai de Jean-Michel Rey, très riche dans la variété des thématiques présentées : l'héritage grec de la culture allemande, sa dette à l'égard de la culture juive, l'écriture comme voie de régénération face au totalitarisme nazi .Un essai pour lutter contre le concept de l'impur, du corps étranger à une civilisation .Une posologie bienvenue…
Commenter  J’apprécie          10



Ont apprécié cette critique (1)voir plus




{* *}