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Critique de Lamifranz


Le problème avec les étiquettes, c'est que, quand il y en a une, ça va, mais quand il y en a plusieurs, elles se chevauchent, et on ne sait plus très bien quelle est la bonne. Voyez les artistes de music-hall, ce sont des amuseurs, on est bien d'accord, mais à quel moment deviennent-ils des humoristes (quand ils le deviennent, il y en a qui restent des amuseurs toute leur vie) ? Pour certains grands amuseurs, Pierre Dac, Fernand Raynaud, Raymond Devos, Coluche ou Pierre Desproges, la question ne se pose pas, ils sont amuseurs ET humoristes, et même ils ont une réelle dimension sociologique, parfois littéraire, ou même philosophique, qui les met un peu au-dessus des autres.
Fernand Raynaud (1926-1973) est d'emblée un amuseur. Comme Raymond Devos, il est passé par l'école du mime, puis par celle des textes. Car c'est la qualité des sketches qui fait la quintessence du spectacle, et qui fait que justement, ce spectacle va au-delà de la simple représentation. Relisez les textes de Fernand Raynaud. Vous y trouverez une observation minutieuse de la vie quotidienne, et plus encore des petits défauts de l'âme humaine. Les personnages de Fernand Raynaud, nous les avons tous croisés un jour ou l'autre, et parfois nous nous reconnaissons nous-mêmes dans ces petites gens, si bien incarnées par l'artiste... Raymond Devos était un clown lunaire, Fernand Raynaud était un clown terrestre.
Faire toucher du doigt, par le rire, les défauts de nos contemporains (et donc les nôtres), c'est un peu le B.A. BA. des humoristes. Quand c'est fait avec esprit, avec finesse, on touche presque à la perfection. Parfois je me dis que Fernand Raynaud est un peu notre La Bruyère : il dépeint l'âme humaine et ses contradictions, de façon spirituelle (il faut dire qu'il ajoute à ses textes toute la puissance d'évocation du mime, et toute son expérience du cirque et du music-hall), et je dirais même qu'il a quelque chose de plus : La Bruyère parlait en généralités, s'adressant à un parterre de nobles et de lettrés. Fernand Raynaud ne sort quasiment pas de la vie quotidienne, son public est universel.
L'univers de Fernand Raynaud se situe dans son entourage immédiat, lui-même, sa soeur, son beau-frère, la chorale avec Monsieur l'abbé et Mlle Lelonbec, Mlle Procul, la spécialiste de l'harmonium, M. et Mme Chalamond, et la foule des petits personnages de la vie ordinaire, le douanier, le boulanger, le tailleur, la postière, le boucher, le marchand d'oranges, le plombier, les militaires...
Et mine de rien, il traite de sujets graves, le racisme, la tolérance, l'acceptation des défauts des autres et de ses propres insuffisances..
Certains diront, c'est daté, on ne rit plus comme ça aujourd'hui. Moi je veux bien, mais rit-on mieux, parce qu'on est plus cru, plus vulgaire et plus méchant? Chacun voit à sa porte, me direz-vous, moi j'ai la faiblesse de penser autrement, tant pis pour moi, ou tant mieux, c'est selon.
En attendant, moi, Fernand Raynaud me fait bien marrer. Pas vous ?


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