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Citations sur Essai Sur Goethe (28)

...la légende de Faust (...) s’est formée en Allemagne, au moment de la Réforme, autour d’un personnage historique qui vécut pendant la première moitié du XVIe siècle. Son existence est affirmée par plusieurs témoignages contemporains, ceux entre autres de Jean Tritheim et de Mutianus Rufus, auxquels on peut ajouter de nombreux fragments de chroniques et beaucoup d’anecdotes consignées dans les ouvrages du temps. C’était un vulgaire charlatan, qui s’en allait de ville en ville en exploitant la crédulité, la sottise, la badauderie et la jobarderie. Glorieux et vantard, il promettait volontiers d’accomplir toutes sortes de miracles : de fait, il savait quelques tours ingénieux, dont les braves gens s’ébahissaient. Ces tours n’étaient pas toujours innocents, car le « sorcier » était doublé d’un escroc, ivrogne en plus, et chargé de quelques autres vices. Bon lettré cependant, il professa dans divers lieux (entre autres à Kreuznach) d’où le chassaient bientôt les inquiétudes de son esprit, ses fredaines, ou les hardiesses de son langage : car il parlait sans aucune révérence des prêtres, des moines, de la religion. Accueilli un instant par les chefs de la Réforme, qui ne furent pas toujours très scrupuleux dans le choix de leurs instruments, il les obligea à le désavouer, par les scandales de sa conduite, par le cynisme de ses propos. Luther déclara, dit-on, qu’il n’y avait en lui « qu’un diable hautain, orgueilleux et ambitieux, qui veut acquérir de la gloire en ce monde, malgré Dieu et sa parole et aux dépens de sa propre conscience et du prochain ». Mélanchthon le fit expulser de Wittemberg. Après cette équipée, il erra pendant quelque temps, vagabond, poursuivi, misérable, à travers l’Allemagne et les Pays-Bas. Il mourut mystérieusement dans un bourg du Wurtemberg.

Le Grand Oeuvre. I
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Entre la vie et l'œuvre, il y a, je ne dirai pas une parfaite unité, mais une cohésion complète : celle-ci continue celle-là, en la poétisant, en la corrigeant, en l'excusant quand il le faut ; elle n'est roman qu'à condition que l'autre le soit d'abord ; le travail de la fantaisie est limité : il consiste simplement à parer la mémoire, à embellir la transposition. Goethe eut donc le sentiment que le récit de sa vie était indispensable à l'intelligence de son œuvre, et, au risque de faire double emploi avec ce qu'il en avait déjà tiré, il résolut de la raconter lui-même.
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Les livres ne furent cependant pas les seuls éducateurs de Goethe ; c’est au lieu même de son séjour qu’il dut la révélation d’un monde aussi nouveau pour lui que celui de Shakespeare. Dès son arrivée à Strasbourg, il avait couru à la cathédrale, qui l’avait fortement impressionné. « Elle produisit sur moi, raconte-t-il, une impression toute particulière que je fus incapable de démêler sur-le-champ, et dont j’emportai l’idée confuse en montant bien vite à la tour, afin de ne pas laisser échapper le moment favorable d’un soleil haut et clair, qui allait me découvrir tout ce vaste et riche pays… »

La crise romantique. I
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Il y a des écrivains dont la production est constante, comme le jaillissement d’une source vive ; chez d’autres, elle est intermittente, assujettie aux conditions ou aux hasards de leur vie : ils ressemblent à ces rivières qui doivent la force de leurs eaux aux neiges de l’hiver ou aux pluies du printemps, et qui, pendant de longs mois, coulent à peine dans un lit desséché. Goethe fut de ceux-ci.

Le dernier roman
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Au lendemain de la publication de Werther, Goethe, à peine âgé de vingt-cinq ans, se trouva célèbre. Mais ce n’était point sa véritable nature que manifestaient les deux œuvres qui venaient de lui conquérir la faveur publique : des influences étrangères l’avaient conduit au romantisme, des rêveries de jeune homme au sentiment ; comme il n’était en réalité ni sentimental ni romantique, il se trouva pour ainsi dire embarrassé d’un être artificiel entré en lui-même, dont son instinct et les circonstances de sa vie allaient le délivrer. Ce travail, en grande partie inconscient, s’accomplit avec une extrême lenteur, pendant un séjour prolongé, monotone et vide, dans la petite cour de Weimar. (...)Il fallut plus de dix années à l’homme qui avait si lestement enlevé Gœtz de Berlichingen et Werther pour donner une nouvelle œuvre digne de ses débuts. Et quand il reparut sur la scène littéraire, paré de ses nouveaux titres, auréolé de la légende qui s’était formée autour de lui, mûri par une gloire plus éclatante et plus universelle, il était entièrement transformé. (...)
Avant de chercher dans une de ses œuvres nouvelles les lignes et le sens de sa transformation, nous voudrions rappeler sommairement les circonstances qui la produisirent. Un tel travail pourrait être une curieuse page d’histoire littéraire, ou plutôt un beau chapitre de cette Philosophie de l’inconscient qu’a esquissée M. de Hartmann : car l’esprit se perd à chercher les liens qui rattachent la composition d’Iphigénie, d’Egmont ou de Tasse à l’existence que mena pendant plusieurs années le confident de Charles-Auguste. Une fois de plus, quand on a examiné les pièces du procès, on est forcé de conclure que le génie est un grand magicien et que souvent, en admirant ses tours, il faut renoncer à les expliquer.

Le poète de la cour
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Quand des sentiments plus élevés le conduiront du tourbillon du monde dans la solitude, fais qu’il découvre, en son pèlerinage, une jeune fille dont l’âme toute bonne en même temps que le corps plein de grâce se soient harmonieusement développés dans les paisibles et actives affections domestiques du cercle de la famille ; qui soit la chérie, l’amie, l’appui de sa mère, la seconde mère de la maison ; dont l’âme, source d’amour, s’attache irrésistiblement tous les cœurs ; auprès de laquelle le poète et le sage puissent s’instruire en contemplant avec ravissement sa vertu innée, son aisance naturelle et sa grâce. Oui, si, aux heures de repos solitaire, elle sent qu’il lui manque encore quelque chose, malgré l’amour qu’elle répand autour d’elle, un cœur jeune et chaud pour pleurer ensemble les béatitudes lointaines et secrètes de ce monde, dans la compagnie de qui elle s’élancerait, étroitement unie, vers les perspectives dorées de l’éternel Être-ensemble, de l’union durable, de l’amour éternel et vivant !

La crise sentimentale. I
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La mort de Schiller l’avait privé du seul ami qu’il aimât peut-être réellement, du seul aussi qu’il pût regarder à peu près comme un pair ; et il voyait croître autour de sa vieillesse une génération nouvelle, dont il se sentait très différent.

Les mémoires. I
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(...) Faust est celle de ces œuvres qui reflète le plus complètement cette existence. Elle en a tout le décousu, disent les détracteurs — toute l’unité, répondent les apologistes. Ce qui est certain, c’est qu’elle l’a remplie. Conçue par l’étudiant, elle fut achevée par le vieillard. Dès son apparition, et même avant, sur les fragments qu’en lisait son auteur, sur ses propos, sur ceux de ses amis les plus proches, elle suscita le plus vif enthousiasme. À peine publiée, elle devint la proie des critiques, des commentateurs, des annotateurs, des adaptateurs, des traducteurs. On salua en elle, en des termes variés, « l’expression la plus haute et la plus ample d’une vie humaine, de l’une des plus riches et des plus lumineuses que le monde ait vues, d’un peuple et d’un siècle. » On l’accueillit d’emblée dans le répertoire éternel, à côté de La Divine Comédie et de Hamlet. Puis quand, à force de l’expliquer, on en eut irréparablement brouillé la simple intelligence, on y tailla des poèmes symphoniques et des livrets d’opéra. Comme les musiciens, les peintres, les sculpteurs, les dessinateurs, les graveurs, s’acharnant sur elle, en illustrèrent toutes les scènes, en fixèrent tous les motifs. Aussi est-il devenu bien difficile de résumer une longue carrière dont les moindres détails nous sont connus, et que trois générations générations d’hommes ont amplifiée. Cette difficulté s’aggrave encore du fait que, sans parler des fragments qui précèdent le premier Faust, l’œuvre de Goethe comprend deux parties distinctes l’une de l’autre, bien que reliées l’une à l’autre. Nous accepterons l’idée discutable de leur unité pour raconter leur formation, et pour rechercher leur sens général.

Le grand oeuvre
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Goethe voyait souvent à Iéna le libraire Frommann. Cet excellent homme avait recueilli et élevé une petite fille du nom de Minna Herzlieb, dont la gracieuse enfance intéressait Goethe. En 1807, pendant un séjour qu’il fit à Iéna, il s’aperçut tout à coup que la petite fille était devenue une jeune fille, et une jeune fille ravissante, avec de grands yeux sombres, une expression très douce, plutôt mélancolique, de beaux cheveux qu’elle roulait en papillotes, selon la mode du jour : une figure romantique, en harmonie avec une maison où l’on goûtait fort les vers de Klinger, d’A. W. Schlegel, de Zacharias Werner. Goethe avait cinquante-huit ans ; elle, dix-huit. Il oublia son âge, il sentit courir dans ses veines l’ancienne flamme de Werther. Le soir, dans le salon du bon libraire, on récitait des sonnets : il en composa toute une série, sur le livre de Pétrarque, en l’honneur de la nouvelle Laure. Comme le poète des Rimes, il joua agréablement sur le nom de la bien-aimée, qui s’y prêtait.

Le dernier roman. III
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L'œuvre de Dante a dû traverser des générations qui n'appréciaient guère sa langue, trop primitive pour leur goût et trop crue, puis, d'une génération à l'autre, il a été admiré et interprété différemment, toujours d'après de nouveaux points de vue : il a toujours gagné à se répandre davantage. Aujourd'hui, Dante domine les siècles égal à lui-même, existant par soi seul. On ne le compare pas aux autres, mais on compare les autres à lui.

La crise romantique. IV
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