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EAN : 9781332537884
322 pages
Forgotten Books (06/03/2018)
4/5   2 notes
Résumé :
Édouard Rod est un écrivain vaudois né en 1857 qui est « monté » à Paris. Il est décédé à Grasse en 1910. Dans son roman « Le Silence », écrit dix ans après la loi Naquet qui rétablissait le divorce en France – mais seulement pour faute d’un des conjoints – il nous propose deux histoires d’amours clandestines soumises au silence et à l’ostracisme social. Nous vous le proposons aujourd’hui en livre numérique.
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Jusqu’à présent, monsieur, j’ai pu vous raconter notre histoire dans ses détails exacts. Maintenant, je ne sais plus… Il n’y a plus de faits, il ne survient rien. Nous sommes enfermés dans cette maison… Nous y vivons seuls, sans entendre d’autres voix que les nôtres et celles de nos domestiques, sans rien savoir des êtres qui nous entourent, ni de ceux que nous avons quittés, ni du monde… Tout ce qui se passe, c’est au fond de nous, dans des ténèbres que nos regards sondent… Ce que nous y trouvons, nous ne le disons pas : car nous observons nos paroles, nous en pesons le sens, nous en mesurons la portée… Chacun de nous se demande ce que l’autre lui cache… Nous n’avons point de confidents, sauf nos silences que nous entendons… Ah ! c’est qu’il y a entre nous quelque chose d’affreux : l’amour qui meurt, non pas de sa mort naturelle, en perdant peu à peu ses exaltations, ses ardeurs, en s’atténuant, en devenant pure affection, sainte tendresse… mais qui meurt de mort violente, en pleine force, parmi des révoltes, et qui résiste, et qui ne veut pas… Tout comme un homme enlevé au plus beau moment de sa vie, à l’heure même où il la savourait le plus, qui la voit fuir et se confond en efforts désespérés pour la retenir…

Quatrième partie
Chapitre Il. Récit
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– Oui, ce fut ainsi… Pourtant, nous n’étions ni l’un ni l’autre corrompus ou pervers… Elle n’avait jamais aimé avant de me connaître, jamais désiré l’amour, jamais songé qu’elle pût faillir à la ligne droite de sa vie ; elle avait de bons sentiments pour son mari, pour sa famille, le respect des lois sociales, la crainte des jugements du monde, le goût du bien : toutes les idées, toutes les opinions, toutes les croyances, tous les intérêts d’une honnête femme… Moi-même, j’étais assez scrupuleux en ces matières ; n’ayant cherché dans mes précédentes liaisons que les distractions ou le plaisir, je me fusse autrefois refusé à compromettre, pour y satisfaire, des intérêts sérieux et respectables. À deux reprises, j’avais même cessé de fréquenter des maisons amies, par crainte d’y porter le trouble, quoique ce fût un pénible sacrifice. J’étais donc aussi, je puis me rendre cette justice, un honnête homme, peut-être même avec plus de délicatesse que cette expression n’en comporte d’habitude quand les sens sont en jeu. Pourtant, je ne crois pas qu’une liaison coupable se soit jamais nouée avec plus de simplicité : ce fut comme si nous avions toujours été destinés l’un à l’autre, comme si notre rencontre avait, en un instant, effacé tout notre passé, anéanti tous les obstacles dressés entre nos deux vies. J’en admirai davantage mon amie : je la jugeai généreuse et noble ; je me dis qu’elle se confiait en mon amour avec une entière candeur, sans mettre aucune réserve à ce don de sa personne que le commun des femmes complique si volontiers de tant d’hésitations mesquines ou de calculs médiocres ; et, attaché à elle par un lien plus fort qu’aucun lien consacré, je me jurai que jamais elle ne regretterait sa confiance…

Quatrième partie
Chapitre Il. Recit
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Hélas ! me disais-je à peu près, nous ne savons rien des autres ! Nous les voyons aller, venir, s’agiter, souffrir, aimer, mourir sans que notre œil malhabile parvienne à percer la couche dure des apparences pour pénétrer au delà, dans les régions de l’âme, celles où réside l’être véritable, éternellement ignoré, impénétrable, inaccessible. Leurs pensées se manifestent à nous par des paroles que nous croyons comprendre, et nous ne sommes jamais sûrs d’en avoir pénétré le sens.

Chapitre XVII
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Or, un jour que nous passions, en bavardant, devant une de ces petites villas bien closes, entourées d’arbres, qui l’avoisinent, j’en vis sortir un couple qui attira mon attention. La femme, très grande, très svelte, était d’une élégance tout à fait inattendue à Weimar, que rehaussaient encore la noblesse de ses allures, l’harmonie de ses mouvements ; elle portait une voilette épaisse, qui m’empêcha de voir son visage. Quant à l’homme, il était d’une beauté remarquable : les traits, réguliers et nets, le teint mat, relevé par une moustache très noire, l’air tranquille, la démarche sûre. Ils allaient sans rien regarder, indifférents avec hauteur au décor de hasard qui les encadrait, absorbés tous deux par quelque chose d’invisible, qui se passait au fond d’eux-mêmes. Je les suivais des yeux, mon compagnon me dit :

– Ce sont des Français. (...)

Ils sortent rarement. La femme est toujours voilée comme aujourd’hui. Je l’ai rencontrée une dizaine de fois, je n’ai jamais vu ses traits. Du reste, ils ne connaissent personne, ne voient personne, ne parlent à personne. (...)
On prétend qu’il y a un drame dans leur passé, reprit le docteur Hort. Du reste, on ne sait pas au juste de quoi il s’agit. Les uns disent qu’ils ne sont pas mariés, d’autres qu’ils sont venus ici après un grand scandale. On s’occupe beaucoup d’eux, dans la ville. Mais, comme leurs domestiques ne parlent pas, on en est réduit aux conjectures.

Quatrième partie
Chapitre I. Prélude
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Ce fut une période de fièvre où j’eus des heures de folie, mais qui ne se prolongea pas. Il n’y eut entre nous aucun manège de galanterie, aucun marchandage. Notre premier aveu fut décisif. Pour ma part, je n’ai pas connu, à ce moment, la moindre lutte intérieure, la moindre hésitation, le moindre scrupule ; c’est sans aucun remords que je me rapprochais de M. H*** et lui serrais la main, quoique j’eusse l’intention bien ferme de lui prendre sa femme ; je fus calculateur, menteur, rusé, hypocrite, quelque peu que je le fusse de nature, sans qu’il m’en coûtât aucun effort. Quant à elle, qui heureusement n’avait pas d’enfants, j’ignore ce que pesèrent dans son cœur les liens de la famille, de l’habitude, du monde, les affections établies, les devoirs, tous ces obstacles qui, parfois, retardent ou même écartent l’issue fatale de l’amour. Les femmes ont toujours plus de vertu que nous, ou de préjugés : elle connut certainement des luttes que j’ignorai ; pourtant, je crois qu’elle traversa rapidement aussi la phase des hésitations, et qu’elle m’aima comme je l’aimais, c’est-à-dire dans l’absolu, sans rien admettre qui fût plus sacré ni plus fort que cet amour, qui pût le ralentir ou le diminuer. Elle répondit à mon premier appel. Elle se donna sans atermoiements, sans coquetterie, sans combat, dans la seule joie triomphante d’être à celui qu’elle aimait et de l’enivrer d’elle…

Quatrième partie
Chapitre Il. Récit
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