AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Seraphita


« Les encombrants » regroupe 7 nouvelles écrites par Marie-Sabine Roger autour du thème de la vieillesse.

« Eliette et Léonard » : Eliette est une mamy comblée : ses petits enfants se sont annoncés pour une visite. Elle s'anime, s'active, met les petits plats dans les grands sous l'oeil attentif et désabusé de Léonard.
« Une garde de nuit » : Monique Lemasson a 58 ans, deux chiens adorés « Youpi » et « Bamboula » et une peur panique du grand âge. Elle est garde de nuit dans une maison de retraite et maltraite sans scrupule les pensionnaires qu'elle hait viscéralement.
« Son père » : Voici l'histoire d'un homme âgé de 89 ans, en maison de retraite, qui n'a plus toute sa tête. Sa fille lui rend visite et souffre de ne plus reconnaître son père : il lui est soudainement devenu étranger, ainsi qu'il est étranger à lui-même.
« On n'a pas tous les jours cent ans » : Mme Vivieux a cent ans. La maison de retraite où elle est pensionnaire lui organise une belle fête. Pour l'occasion, M. le député s'est déplacé, assez pressé cependant, puisqu'une heure plus tard, il doit assister à un enterrement. Les médias sont également de la partie, entre deux reportages. Entre discours orienté et caméra manipulatrice, comment Mme Vivieux va-t-elle vivre l'événement ?
« Rose thé » : Une femme un peu sauvage dans sa maison d'enfance. Elle traduit avec peine un roman russe. Un homme âgé fait irruption dans son domaine. Il s'est égaré, il est confus. Il s'extasie devant les roses du jardin.
« Vic » : Georges et Vic. Un homme âgé et son chien. Aujourd'hui, Georges fulmine : son maudit bâtard s'est fait la belle. Il jubile déjà intérieurement de la belle correction qu'il lui donnera à son retour. Vic, de son côté, un mâle fringuant, gambade, flairant les fragrances excitantes des femelles en rut…
« Comment fait-elle ? » : Une femme retraitée dans un café attend impatiemment une autre dame âgée. Après une longue attente, la voici enfin, porteuse d'une nouvelle pour le moins surprenante…

« Les encombrants » : n'est-ce pas ainsi que l'on désigne les déchets imposants que l'on doit, de ce fait, porter en déchetterie ? C'est sous ce signe que Marie-Sabine Roger (l'auteure également de « La tête en friche ») place ce recueil de nouvelles consacré aux personnes âgées. Comment les perçoit-on aujourd'hui ? Telle pourrait être la question que pose l'auteure ici.
Comment les perçoivent les petits-enfants ? de manière opportuniste et intéressée, ainsi que semble le penser le mystérieux Léonard dans la première nouvelle ? Cette dernière m'a semblé particulièrement cruelle et j'ai vraiment souffert pour la pauvre mamy, si pleine d'espoir et d'illusion face à ses petits-enfants. J'ai apprécié, par contre, l'originalité du point de vue narratif.
Comment les perçoivent les soignants ? « Une garde de nuit » est particulièrement éloquent à ce sujet. L'auteure conte la maltraitance de cette soignante en donnant quelques clés compréhensives. Mais le ton m'a semblé très violent et dur. L'auteure sait bien dire au final combien les personnes âgées nous renvoient le masque insupportable de notre limite ultime : la mort.
Comment les enfants appréhendent-ils la vieillesse de leurs parents, notamment quand le voile de la confusion leur ôte toute clarté d'esprit ? « Son père » explore cette question avec pudeur et sensibilité.
Comment les maisons de retraite perçoivent-elles l'extrême vieillesse ? « On n'a pas tous les jours cent ans » est à mes yeux la meilleure nouvelle du recueil : l'humour y est particulièrement noir, ourlé de cynisme. Elle vient pointer l'absurdité de ce type de célébration. le sens qui y est donné par chacun des protagonistes diffère, mais peut trouver un point d'unification autour de la récupération et de l'intérêt personnel mesquin : le directeur de la maison de retraite, M. le député, en pleine période électorale, la journaliste et ses caméras qui ne peuvent filmer que le correct, le vernis des situations. Aussi, quand survient l'accident mictionnel de Mme Vivieux (qui fête donc ses cent ans), c'est la brèche du réel qui fait retour.
Avec « Vic », c'est le chien, fidèle compagnon du vieillard, qui apparaît. Une nouvelle cruelle, dont je devinais l'issue, mais qui explore bien les liens maître âgé – chien, qui peuvent révéler à un spectateur extérieur bien des surprises.
« Comment fait-elle ? » clôt le recueil sur une note de surprise, avec un dévoilement d'identité inattendu.

Un excellent recueil de nouvelles qui explore la vieillesse, la mort et la peur de la mort. Les premières me sont apparu extrêmement dérangeantes, les suivantes plus tendres et un peu plus nuancées, avec un coup de coeur pour « On n'a pas tous les jours cent ans », cynique à souhait et teintée d'humour noir.
Commenter  J’apprécie          160



Ont apprécié cette critique (5)voir plus




{* *}