Il a l’impression d’avoir gâché la vie de toutes les personnes qui l’ont ne serait-ce qu’un peu aimé.
Au lycée, ils étaient au même endroit, à la fois perdus et en souffrance, et depuis elle était persuadée que s'ils y retournaient ensemble, ils éprouveraient la même chose. Elle comprend désormais que, ces dernières années, Conell s'est lentement adapté au monde, un processus parfois douloureux mais constant, alors qu'elle a regressé, s'est éloignée de plus en plus de l'équilibre mental, est tellement abîmée qu'elle en est devenue méconaissable et qu'ils n'ont plus rien en commun.
Il y avait chez Marianne une sauvagerie qu'il s'est appropriée un temps et lui a donné l'impression d'être comme elle, d'avoir la même blessure spirituelle innomable, et qu'aucun d'eux ne trouverait jamais sa place dans ce monde. Mais il n'a jamais été aussi abîmé qu'elle. C'est seulement ce qu'il éprouvait à son contact.
L'argent est la substance qui donne au monde sa réalité.
Elle savait que si elle voulait dire quelque chose, tout le monde se tournerait pour l'écouter avec un intérêt sincère, et cela aussi la rendait heureuse, même si elle n'avait rien à dire.
Parfois, il a l'impression que Marianne et lui sont des patineurs artistiques, improvisant leurs discussions avec une adresse et une synchronisation si parfaite qu'ils s'en étonnent tous les deux. Elle s'élance en l'air avec grâce, et chaque fois, ignorant comment il va bien pouvoir s'y prendre, il la rattrape.
Ce qu'ils ont en ce moment, ils ne le retrouveront jamais. Mais pour elle la douleur de la solitude ne sera rien comparée à la douleur qu'elle éprouvait avant, celle d'être méprisable. Il lui a offert sa bonté comme un cadeau, et désormais ça lui appartient. Pendant ce temps, la vie de Connell s'ouvre à tous les possibles. Ils se sont beaucoup apporté l'un à l'autre. Vraiment, se dit-elle, vraiment. Les gens peuvent vraiment se changer mutuellement.
La littérature, sous la forme qui était la sienne dans ces lectures publiques, n'était en rien un moyen de résistance. Il n'empêche, après être rentré chez lui ce soir-là, Connell a relu les notes qu'il avait prises en vue d'écrire une nouvelle et a senti un frisson de plaisir familier à l'intérieur de son corps [...]. La vie offre ces moments de joie en dépit de tout.
« Marianne answers the door when Connell rings the bell. » is the first sentence of the book.
Re reading it after finishing the book is pure magic. It’s crazy how it tells everything about them.
And, as we say in French : La boucle est bouclée.
Connell a relu les notes qu'il avait prises en vue d'écrire une nouvelle et a senti un frisson de plaisir familier à l'intérieur de son corps, comme quand on assiste au but parfait, comme le bruissement de la lumière dans les feuilles, une mélodie s'échappant par la vitre d'une voiture qui passe. La vie offre ces moments de joie en dépit de tout.