AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations sur Les méduses n'ont pas d'oreilles (39)

La Revue anarchiste des neurosciences avait publié un dossier entier sur les déracinés du langage. Un psycho-pédiatre spécialisé en linguistique et en phonologie avait entrepris d’analyser les cris et les sons inarticulés d’un panel d’enfants déficients mentaux et était parvenu à la conclusion que chacun disposait du matériel sonore de toutes les langues – le th anglais, le r roulé espagnol, le r guttural arabe, le ch allemand. Il démontrait ainsi que tout être humain avait à l’origine de quoi articuler toutes les langues existantes mais aussi toutes les langues possibles, et qu’en assimilant la langue maternelle, il perdait les phonèmes inutilisés. La conclusion m’a rendue perplexe : notre langue était plus riche quand nous étions privés de langue maternelle.
Commenter  J’apprécie          10
La bouche d’Anna s’ouvrait pour les l, me dévoilant ainsi sa langue qui cherchait à décoller les miettes coincées entre ses dents. Les phrases d’Anna étaient pleines de voyelles extrêmes, striant son visage de multiples ridelles, comme si sa bouche était l’endroit d’impact du ricochet dans l’eau et son visage des ronds en gigogne.
Commenter  J’apprécie          10
J’avais ainsi lu le texte intitulé : « Le passé échappe ». Il expliquait que les tentatives qui se développaient pour archiver le Web n’y faisaient rien, que le passé échappait, que le futur allait être encore moins enregistrable et conservable. La fragilité des supports, leur durée de vie extrêmement courte faisaient que nous entrions plus encore dans l’oubli. Je courais le danger de voir s’effacer de mes oreilles tout ce que je ne consignais pas quotidiennement dans mon herbier sonore.
Commenter  J’apprécie          10
Dans la vitrine suivante, des carrés gris avec en leur centre des petits trous noirs étaient épinglés sur des plaques numérotées. Je me référais à la légende pour y lire qu’il s’agissait d’oreilles de poissons. Un bouton était disposé à côté, j’ai appuyé dessus, déclenchant une salve de vibrations qui sont remontées jusque dans mes avant-bras. Un panneau lumineux s’est affiché pour compléter les informations : l’expérience sensorielle nous présentait la façon dont le poisson appréhendait le son, par vibrations.
Puis, on s’orientait vers le carré suivant complètement translucide : l’ouïe de méduse, l’opposé du trou noir que représente l’oreille chez les poissons et chez l’homme.
À la place d’un bouton, on pouvait plonger son doigt dans un amas visqueux qui, de temps en temps, se contractait comme une vulve. Le petit encart lumineux précisait que les méduses n’avaient pas d’oreilles, qu’elles possédaient des organes sensoriels orientés vers la sensibilité visuelle ou l’équilibre. Je me sentais méduse, flottant dans la masse, sans visibilité.
L’huître occupait l’espace de transition vers l’oreille humaine. On pouvait glisser de nouveau son doigt et ça pinçait. L’encart lumineux précisait que l’huître réagissait aux audiogrammes qu’une équipe de chercheurs avait produits en se refermant brutalement, surtout lors des fréquences graves. Leur sensibilité aux vibrations du son leur permettait d’entendre le ressac, les dorades et les navires. L’encart, enfin, expliquait que ces derniers nuisaient à la santé des huîtres qui s’ouvraient et se refermaient bien trop fréquemment. Je les comprenais.
Commenter  J’apprécie          10
C’est alors que je me suis souvenue de cette phrase de Victor Hugo : « Qu’importe la surdité de l’oreille, quand l’esprit entend ? La seule surdité, la vraie surdité, la surdité incurable, c’est celle de l’intelligence. » Ni lui, ni Anna ne pouvaient me consoler.
Commenter  J’apprécie          10
Je n’entendais jamais la porte s’ouvrir au matin malgré l’appel de l’infirmière. Les infirmières semblaient agacées. Même dans le service d’hospitalisation ORL, mal entendre relevait encore de la lutte des classes avec les entendants.
Commenter  J’apprécie          10
Je n’étais pas seule dans ce cas, précisait-elle, tous les malentendants passent par des phases dépressives, résultat de tous les efforts cumulés qui ne sont pas perçus par la société entendante. Il est difficile de mesurer cette énergie et l’entourage peine à s’en rendre compte, c’est le propre de ce handicap invisible. Le sujet malentendant a tendance, dès lors, à se couper du monde.
Commenter  J’apprécie          10
Nils Oyat a conclu que le soldat était atteint du syndrome de la langue trouée.
"Quelle est cette maladie ? j'ai demandé.
- Ce n'est pas une maladie mais un mal à dire."
J'ai longtemps réfléchi et je me suis dit que si le silence faisait partie du langage, il n'était pas son contraire mais une entité intrinsèque à la langue.
Le silence était un lieu où résider dans le langage. Le silence libérait des mots et des images que le langage retenait prisonniers. Je n'étais donc pas perdue mais en chemin.
Commenter  J’apprécie          10
C'est alors que je me suis souvenue de cette phrase de Victor Hugo : "Qu'importe la surdité de l'oreille, quand l'esprit entend ? La seule surdité, la vraie surdité, la surdité incurable, c'est celle de l'intelligence." Ni lui, ni Anna ne pouvaient me consoler.
La nuit, dans la noirceur du silence, le soldat et le chien se tenaient au pied du lit. La peur me maintenait à la verticale, le regard rivé sur l'horizon formé par notre triade inquiète d'orbites écarquillées et de gueules ouvertes sur la nuit.
Seule la lecture pouvait calmer l'angoisse de la disparition, voir les mots intacts, palpables, encrés.
Commenter  J’apprécie          10
La principale protagoniste est malentendante depuis sa jeunesse, et au début de l’ouvrage on apprend qu’elle devient malheureusement sourde profonde, progressivement. Toute la question de l’ouvrage est la perte progressive de l’audition, savoir s’il faut se faire implanter un système dans le cerveau, et une liste interminable de quiproquos avec des valides.

L’épisode d’hospitalisation est narré de manière espiègle, mais le reste de l’ouvrage est linéaire et peu intéressant. Le roman se lit rapidement (notamment par son chapitrage ciselé), mais il m’en restera peu de souvenir.
Commenter  J’apprécie          10





    Lecteurs (339) Voir plus



    Quiz Voir plus

    QUIZ LIBRE (titres à compléter)

    John Irving : "Liberté pour les ......................"

    ours
    buveurs d'eau

    12 questions
    288 lecteurs ont répondu
    Thèmes : roman , littérature , témoignageCréer un quiz sur ce livre

    {* *}