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Critique de Malivriotheque


Quand la star planétaire Vina Apsara périt dans un tremblement de terre, le monde entier pleure la disparition d'une icône. Son mari/partenaire sur scène Ormus Cama n'arrive plus à vivre ; son meilleur ami/amant Rai retrace sa vie, leur rencontre et leur trio impossible...

Après la peinture dans le Dernier soupir du Maure, Rushdie encense l'Art sous sa forme musicale en dépeignant le destin d'un duo prédestiné à toucher les étoiles mais aussi maudit que certains couples légendaires tirés des mythologies grecque, romaine et indienne. Même si cet opus est aussi long et répétitif que le précédent, il est pourtant plus plaisant et séduisant dans la mesure où le présent narratif est beaucoup plus proche de nous en étant moins ancré dans le passé du siècle dernier (comprendre autour de 1947 et de l'indépendance de l'Inde, comme dans Les Enfants de minuit ou le Dernier soupir du Maure), mais aussi surtout parce que le récit se passe majoritairement en Occident, apportant ainsi une dimension plus internationale et quand même plus accessible au lecteur qui ne vient justement pas d'Orient et a grandi en plein boom de la mondialisation (comprendre les années 70-80 jusqu'à l'an 2000). D'autant plus que l'histoire développe une réalité à laquelle nous sommes confrontés tous les jours en tant que consommateurs programmés : le culte de la personnalité, la célébrité et ce qui se cache derrière (la chronique de la mort de Vina rappelle furieusement celle de Lady Diana, décédée deux ans avant la parution de ce roman, ça sent le vécu).
Vina et Ormus sont donc présentés comme les nouveaux enfants chéris du monde, sur fond de drames familiaux et d'amours impossibles, tout en jouant avec la dualité dans de nombreux thèmes qui sont pour certains récurrents dans l'oeuvre de l'auteur : réalité/fiction, Orient/Occident, vie/mort, notremonde/autremonde, visible/invisible, justice/injustice...
Cet opus est fort garni en références culturelles, historiques et linguistiques, mais surtout l'intertextalité de l'oeuvre à ce moment-là publiée n'a jamais été aussi prégnante car les références aux romans précédents ont beau être subtiles, elles sont quand même légion. Cela fait sourire, c'est rusé et charmant. Quant aux références à la vie même de l'auteur (j'ai nommé la fatwa de 1989), elles prennent encore plus de place que dans le précédent ouvrage qui était celui qui suivait directement cette nouvelle menace. Rushdie relie carrément la mort de son héroïne à la date réelle du 14 février 1989 où l'épée de Damoclès s'est calée au-dessus de sa tête ; il commence même son livre par cette date. Tout cela sans compter certaines réflexions philosophiques qui sentent le personnel, ou la mention de certains évènements historiques (comme la mort de Khamenei la même année, lui-même déjà mentionné dans le livre d'avant. Mentionnons même cette citation de Popeye qui revient pour la deuxième fois (déjà cité dans le Dernier soupir du Maure) et qui a visiblement toute son importance puisqu'on la retrouve même dans la description de l'auteur sur son compte Twitter : "I yam what I yam and that's all that I yam" !!! (ouais, c'est ça d'enchaîner ses romans, on finit par se rappeler ces mini-détails, je serai bientôt bonne pour écrire une thèse !!). Ainsi donc, mieux vaut ne pas s'attaquer à cet auteur sans tout le bagage pré-cité. Et surtout, l'intérêt de lire ses ouvrages dans l'ordre chronologique d'écriture (chose que j'ai décidé de faire après la lecture de son autobiographie Joseph Anton) commence sérieusement à prendre tout son sens vu qu'on finit par voir ce genre de chose. Ce type de lecture rapproche encore plus de l'auteur et de son expérience d'écriture...
Pour terminer, je dirai que l'histoire est une nouvelle fois très vaste, avec de nombreuses ramifications, pléthore de retours en arrière, beaucoup de personnages et de familles, et que le titre a encore une fois plusieurs niveaux de lecture et compréhension (bien que plus simple que le précédent).
C'est encore un résultat dense, enchanteur, titanesque, qui laisse pénétrer une part de surnaturel de mystérieux, de métaphysique. Bref, un gros Rushdie, mais un vrai bon cru.
Lien : http://livriotheque.free.fr/..
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