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Critique de LouSalome


L'Éveil est un livre méconnu (qui n'est plus tout jeune, ce qui peu expliquer l'absence d'intérêt actuel pour ce qui fut un best-seller), qui trouble son lecteur au delà de ce qu'il pourrait croire en ouvrant ce livre pour la première fois.
L'encéphalite léthargique, ou la maladie du sommeil, est une maladie disparue, un peu comme la grippe espagnole : une ancienne épidémie en frappa le monde de façon brutale, pendant une courte décennie, puis le fléau disparait comme il est apparu, sans que l'on ait jamais trop bien compris ses mécanismes. Les symptômes du début de la maladie était si variées que l'on avait peine a reconnaitre l'encéphalite léthargique de la catalepsie, ou de la schizophrénie, dans certain cas. Dans certains cas, les patients ne trouvent plus le sommeil et passent de longs jours éveillés, avant de mourir d'épuisement. Chez d'autres patients, on reconnait des symptômes contraires : sommeil ou somnolence diurne, léthargie profonde, puis le coma et la mort. Des millions de personnes en sont mortes, mais bien plus on été handicapés suite à cette maladie. Les lésions cérébrales consécutives à l'encéphalite font sombrer les patients dans un état parkinsonien sévère, duquel à l'époque aucune médication ne parvient à les sortir.

Ce scénario semble être de la science-fiction a vos yeux? Et pourtant, cette épidémie à réellement eu lieu, au cours des années 1920. Quarante-cinq ans plus tard, en 1965, un jeune neurologue anglais (il est nécessairement plus jeune que tout ses patients) est embauché dans un hôpital pour malades chroniques, ou vivent encore plus d'une centaine de ces personnes qui ont survécue à l'épidémie, et qui ont par la suite sombré dans le Parkinson pendant... près de 50 ans! Alors que le Dr. Oliver Sacks traite ces individus considéré comme perdu pour la médecine, un nouveau médicament révolutionnaire est découvert : la L-Dopa, un précurseurs de la Dopamine dans le cerveau. C'est justement le neurotransmetteur qui fait défaut aux parkinsoniens, de même qu'à ces patients internés et léthargiques depuis un demi-siècle! le Dr. Sacks entreprend donc de traiter les patients endormis avec ce nouveau médicament... Mais celui-ci n'est pas sans danger, et manipuler la chimie complexe du cerveau humain est un jeu auquel aucun scientifique ne s'adonne sans risque.

D'un point de vue médical, il s'agit d'un ouvrage majeur, car seul deux hôpitaux dans le monde accueillaient à l'époque de la découverte de la L-Dopa un nombre consistant de rescapés de l'encéphalite léthargique : un près de New-York (celui du Dr. Sacks) et un autre en Angleterre. Aujourd'hui, ces rescapés déjà très âgés aux moments de l'histoire, sont inévitablement décédés. Ces personnes souffraient d'une forme de Parkinson extrêmement sévère, comme on en voit aux derniers degrés de la maladie et leur traitement fut en lui même une épopée médicale et humaine digne d'être raconté.
Mais c'est surtout d'un point de vue humain que cet ouvrage se détache de tout les autres. Oliver Sacks nous raconte avec une immense humanité l'histoire de chacune des personnes dont il racontera le traitement : il souligne leurs intérêts, parle de leur famille, de leur métier. Voilà selon moi le signe subtil d'un grand médecin : il aurait été tellement facile de faire de ce livre un condensé des réactions au traitement, sans aborder aucun aspect personnel, tant ces personnes étaient devenues difficiles d'approche, profondément handicapées par un demi-siècle de souffrance, incapables de parler, de bouger et de contrôler le moindre de leur mouvement. Et pourtant. Sacks redonne vie, il dépeint leur humanité en trouvant en chacun d'entre eux une raison de s'y attacher.
Malgré les défaites souvent rencontrées et les souffrances inhérentes au travail dans un hôpital du malades chroniques, Sacks nous livre un témoignage d'humanité immense. On le sens touché par la personnalité et le drame qui se révèle chez chacun des patients.

Au delà de tout ces éléments qui font de cet ouvrage un essentiel, il y a aussi la vision de la neurologie du Dr. Sacks qui est importante dans ce récit. Comme dans plusieurs autre de ses ouvrages, le parallèle est important à faire avec les livres d'Alexandre Louria. Tout les deux considère que l'on fait "de la neurologie sans âme, et de la psychologie sans corps". Notre conception de la médecine est encore influencée par Descartes et son dualisme corps / esprit, alors que nous savons bien qu'aucune division n'est aussi artificielle que celle-là! Sacks est en faveur de l'unification de ces deux discipline, qui en fait, ne sont qu'une.

En bref, je recommande cet oeuvre avec enthousiasme, pour tout ceux ayant un peu d'intérêt pour la médecine, la neurologie, ou la philosophie des sciences en général. Ou simplement pour l'aventure humaine.
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