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Critique de Ellane92


Montserrat est une vieille dame qui a presque tout oublié de sa vie, à mesure qu'Alzheimer grignote ses souvenirs. L'une des rares choses qu'elle n'a pas oublié, c'est ce fameux été de l'année 1936, quand l'Espagne commençait à se fragmenter et à s'affronter de toute part, et qu'elle s'est sentie vivante pour la première fois. Et c'est là l'histoire qu'elle raconte à sa fille, en "fragnol" : la misère, les traditions séculaires, l'humiliation de sa mère, la révolte de son frère, le départ vers la grande ville…
Bernanos, lui, ce même été, parcourt l'île de Palma de Majorque, notant dans ses carnets toute la folie des franquistes qui éliminent à tour de bras ceux qui leur paraissent suspects (et il y en beaucoup) sous la très bienveillante complaisance du clergé catholique. Ces notes seront à l'origine de son livre "Les Grands cimetière sous la lune".


La guerre d'Espagne… Rétrospectivement, je me dis que j'en connais peu à son sujet, alors qu'elle est à l'origine de l'exode de ma famille. Mon grand-père faisait partie de ces gens qui, comme la famille de Montse, n'étaient pas loin de crever la dalle sans espoir d'amélioration de leur situation. A la révolte et à la guerre, il a préféré l'émigration, mais ça, c'est une autre histoire.

J'ai beaucoup aimé ce livre de Lydie Salvaire, et pour plusieurs raisons. D'abord, parce qu'elle choisit de mettre en scène toute la complexité des parties prenantes de ces évènements dans un petit village espagnol. Tous les mouvements y sont représentés et s'affrontent, mettant au grand jour les grandes petitesses de la nature humaine : lâcheté, cruauté, vengeance... franquisme et communisme atteignant leur point critique dans l'affrontement entre le frère de Montse et son mari. La grande histoire nous est donc contée au travers de la petite, celle de ce personnage principal qui raconte à sa fille ce qu'il lui reste de ses souvenirs. J'ai également aimé la neutralité de l'auteur dans ce conflit : elle ne soutient ni les uns ni les autres, mais explique leur origine, et dénonce autant les exactions des uns que celles des autres. Les récits que l'on pourrait croire opposés de Montse et de Bernanos, que lit le narrateur, sont finalement très proches dans leurs contenus, alors qu'ils s'intéressent à des partis opposés qui se passent à des endroits différents. C'est la subjectivité qui change.
Pas pleurer est un livre à la fois drôle et émouvant, aussi bien dans son histoire que dans la façon dont elle est écrite. J'y ai trouvé un coté très espagnol, dans le "machisme" des hommes, leur fierté qui tend à l'orgueil ou la morgue, dans l'excès des discours et des comportements, une espèce d'excentricité que l'on retrouve dans les films d'Almodovar par exemple. J'ai été enchantée par le "fragnol", ce langage que Montse parle, mélange très imagé de français et d'espagnol. le texte est émaillé de nombreux slogans ou expressions espagnoles non traduites. Mon espagnol scolaire remonte à loin, mais je n'ai pas eu de mal à les comprendre. La plupart du temps, les mots espagnols utilisés sont proches de mots français, et les expressions plus typiques sont reprises en français.

Enfin, ce livre m'a été offert par une amie proche. Comme ça, pas pour une occasion particulière, juste pour le plaisir de me faire plaisir. Alors forcément, avant même de l'ouvrir, je l'aimais presque déjà…
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