Un juriste pédagogue dirait : "Le voleur qui s'est approprié ton vélo en est le possesseur, tu en restes le propriétaire". Appliquée à notre question, cette distinction recèle un certain potentiel libératoire. Selon elle, les musées sont les possesseurs des objets en leur pouvoir ; ils en disposent en fait, sans pour autant que ceux-ci leur appartiennent nécessairement en droit. Les propriétaires, en revanche, demeurent ceux dont l'objet, même s'il est perdu, reste le "propre". Pourtant dans la réalité de notre siècle, ces frontières existent plus que jamais et empêchent une large partie de l'humanité d'approcher les musées occidentaux.
Pour ceux qui possèdent les œuvres, la formule peut séduire. Mais combien des temps encore ceux qui ne les possèdent plus et n'y ont pas accès supporteront-ils d'êtres tenus écartés de leur propre histoire ? et combien de temps feindrons-nous d'ignorer, en Europe, que l'injustice patrimoniale héritée du XIXème siècle est l'un des très grands défis de l'avenir ?