Il n'y a qu'une chose qui cloche vraiment chez toi, c'est que tu es jeune. Mais c'est un défaut qui se corrige vite.
Mais il y avait une chose qui m'intriguait au possible, et elle avait beau crever les yeux, j'avais bien mis deux semaines à m'en apercevoir : Shane ne portait jamais d'arme.
En ce temps-là, dans nos régions, le colt était au nombre des articles courants, au même titre que la selle ou les bottes. On ne s'en servait guère par chez nous, sinon une fois de temps en temps, à la chasse. Néanmoins, cela restait un objet familier et la plupart des hommes ne sortaient jamais sans le leur.
Lorsqu'il s'agissait de brûler des cartouches – c'est-à-dire à la chasse –, nous autres fermiers préférions la carabine ou le fusil à deux coups. Un pistolet qui vous battait la hanche était plutôt gênant pour vaquer aux différents travaux de la ferme. Chacun de nous possédait cependant un colt avec étui et cartouchière qu'il portait parfois en dehors des heures de travail. Quand il s'absentait, ne fût-ce que pour descendre en ville, mon père prenait toujours le sien, plus par habitude, je suppose, que pour toute autre raison.
Mais le Shane, lui, n'en portait jamais. Et c'était d'autant plus curieux qu'il en possédait un.
Pour sauvegarder son amour-propre on n'a pas nécessairement besoin de massacrer le premier qui vient vous manquer de respect.
Ce qui compte, ce n'est pas ce qu'un homme sait faire, c'est ce qu'il est.
Son visage, rasé de frais, était maigre et dur, recuit par le soleil depuis le front haut jusqu'au menton effilé. À l'ombre de son chapeau, on aurait dit qu'il avait les yeux clos. Mais je vis, quand il fut plus près, qu'en fait une expression de vigilance lui maintenait les sourcils continuellement froncés. Ses yeux étaient sans cesse en mouvement; il enregistrait chaque détail, rien ne lui échappait. Lorsque je notai cela, et bien qu'il fit grand soleil, un frisson me parcourut subitement, frisson que je n'aurais su expliquer.
Une arme peut faire le bien et elle peut faire le mal : tout dépend de ce que vaut le propriétaire.
Ce qui compte, ce n'est pas ce qu'un homme sait faire, c'est ce qu'il est.
Il chevauchait sans peine, bien posé en selle et prenant paresseusement appui sur ses étriers. Cependant, cette aisance même suggérait une espèce de tension. C'était le jeu facile et bien huilé d'un ressort prêt à se détendre, d'un piège prêt à se refermer.
- Écoute bien ce que je vais te dire, Bob. Une arme n'est rien de plus qu'un outil. Ce n'est ni meilleur ni pire que n'importe quel ustensile - une pelle, une hache, une selle ou ce que tu voudras. Garde ça bien en tête, toujours. Une arme peut faire le bien et elle peut faire le mal : tout dépend de ce que vaut son propriétaire.
Il était celui qui, chevauchant dans les rougeoiements du couchant, était venu dans notre petite vallée, celui qui, son œuvre accomplie, s'en était allé de même. Il était Shane.