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Critique de SZRAMOWO


La Fontaine a transposé dans son environnement les fables d'Esope, n'hésitant pas à travestir les puissants de son monde en ces animaux dotés de morale de pouvoir de compassion mais aussi parfois d'avarice de haine et de jalousie.
Pour La Fontaine la morale permet à chacun d'y trouver son compte. Les petits heureux de trouver l'occasion de vilipender les puissants, et les puissants satisfaits de mesurer la force de leur pouvoir.
Comme dit Alberto Moravia dans la citation en exergue de l'ouvrage : « Il y a certes un pessimisme satisfait et cruel chez Sciascia. Mais, il faut chercher, comme toujours, l'optimisme dans l'écriture. »
Voeux pieux de la part du grand homme, car on a beau chercher, l'optimisme s'il existe, réside dans la férocité des récits.
Si l'agneau de la Fontaine peut tenter de discourir avec le loup, répliquant qu'il boit en aval du loup, qu'il n'était pas né l'an dernier, qu'il n'a pas de frère, celui de Siascia n'a pas le temps de dire ouf qu'il est déjà dans la gueule du loup. « D'un bond il lui tomba sur le râble pour le mettre en pièces. »
Différence entre la Démocratie où l'on se fait « bouffer » en débattant et la dictature où l'on se fait d'abord « bouffer » et l'on peut discuter après….le cas échéant…
La déconstruction de ces récits qui ont enchantés notre enfance à l'école comme le rappelle Pasolini dans la postface, est à l'avenant.
Risible et cruelle, à l'image du pauvre rat qui pénétrant dans un grenier rempli fait preuve de la timidité et de la sagesse de ceux qui n'ont rien et au lieu de se jeter sur cette montagne de nourriture décide de prendre le petit bout de fromage tombé par terre « Alors la trappe eut un déclic, qui le délivra du souci de tous ces vivres à avaler. »
Veule et pathétique, la lâcheté du chien de garde préférant garder une parcelle de pouvoir plutôt que d'autoriser le lapin à pénétrer dans le jardin : « Ce que tu dis est vrai ; mais pour moi rien ne vaut le plaisir de te faire peur. »
Consentement et renoncement, dont on ne sait s'ils cachent de la résignation, semblent animer les animaux de ces fables, le crapaud se réjouit du progrès que représente le train qui va l'écraser, le chien assimile les coups de pieds de son maitre à la douce odeur du cirage de ses chaussures, l'âne adore le rythme des coups de bâton qui lui permette de mieux faire rimer ses poésies, le rat plaint l'homme qui doit l'exécuter « il y pense plus que moi qui doit mourir . »
A lire.
A noter, le soin apporté par les éditions Ypsilon dans la réalisation des ouvrages proposés, format, papier, couverture, police. En plus d'être un texte de référence, Fables de la dictature est un bel objet agréable à tenir entre ses mains.
La couleur lie de vin de la couverture est un magnifique clin d'oeil à la nouvelle de Sciascia « La mer couleur lie de vin. »

Lien : http://desecrits.blog.lemond..
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