“ « Une fois au milieu de ma pelouse, je me suis allongée, bras et jambes écartés. Je regardais les étoiles au-dessus de moi. Comment avais-je pu me retrouver dans ce quartier ? Dans un endroit où ce genre de comportement faisait de vous une cinglée, alors que mes voisins, qui coiffaient leurs canards en béton de bonnets à Pâques et de chaussettes à Noël étaient considérés comme sains d’esprit ? » (page 106)
Noir de lune, c’est à la fois la face cachée et la face visible de la mère de la narratrice, mais aussi de son père et, au final, d’elle-même : Helen, matricide. Avec elle, nous saisissons les mécanismes douloureux qui l’unissent à la victime :
« Je connaissais les limites de ma mère parce qu’elles constituaient la moelle de mes os. Je compris alors, comme je le pressentais depuis des années, que j’étais née pour être sa représentante dans le monde et lui rapporter ce monde à la maison – qu’il s’agisse des créations multicolores en papier kraft de mes premières années d’école ou d’affronter des hommes en colère surgis dans le jardin. Je ferais cela pour elle. C’était notre contrat tacite à nous, la façon dont cette enfant servirait ce parent. »
" - ça t'intéresse vraiment ?"
J'ai hoché la tête.
" - C'est un monde complètement nouveau. J'ai de plus en plus de commandes privées. ça vaut largement l'enseignement. Je dois dire que Berne m'a usé.
- Autrement dit, tu fais la pute.
- Ah, enfin je te retrouve ! "
Le mélange des laines et le motif rayé étaient censés produire un résultat automnal, mais il était plutôt intestinal, en effet. ( p.270)
Mon père avait bien quitté la scène, et moi, je faisais mon entrée. A mes yeux, reprendre le fardeau de ma mère n'était pas seulement mon devoir, c'était peut-être aussi le plus beau cadeau que je pouvais lui faire à titre posthume.
Morte ou vive, la mère ou l'absence de mère façonne toute votre vie.
"Salope", a-t-elle dit.
Ce qu'il y a de particulier, avec la démence, c'est qu'on a parfois l'impression que ses victimes ont un fil de détente raccordé à la vérité, comme s'ils pouvaient voir ce qu'il y a sous la peau dans laquelle on se dissimule.
"Maman, c'est moi, Helen.
- Je sais bien qui tu es !" a-t-elle aboyé.
Mon père avait bien quitté la scène, et moi, j'avais fait mon entrée. A mes yeux, reprendre le fardeau de ma mère n'étais pas seulement mon devoir, c'était peut-être aussi le lus beau cadeau que je pouvais lui faire à titre posthume.
La discipline , c'était ce qui marchait le mieux entre nous. Les habitudes étaient bien plus réconfortantes que l'amour.
Ce que je ne dis pas, c'est que je n'avais pas l'intention de lui reparler. Que le matin, je me réveillerais et quitterais la maison assez tôt pour ne pas être obligée de la voir. Que je commencerais à accumuler des provisions pour pouvoir faire semblant de ne pas avoir faim au dîner. Que M. Forrest m'avait fait un cadeau plus précieux que toutes les leçons de conduite, que tous les gin tonics. Il avait traité ma mère de "malade mentale", et même si mon père ne le faisait jamais, j'étais bien décidée à y voir notre vérité.
Je compris alors, comme je le pressentais depuis des années, que j'étais née pour être sa représentante dans le monde et lui rapporter ce monde à la maison - qu'il s'agisse des créations multicolores en papier kraft de mes premières années d'école ou d’affronter des hommes en colère surgis dans le jardin. Je ferais cela pour elle. C'était notre contrat tacite à n,nous, la façon dont cette enfant servirait ce parent.