AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de ClaireG


Fabuleux conteur que Luis Sepulveda.
Je continue la lecture de son oeuvre avec un plaisir sans cesse renouvelé.
Ce qui l'intéresse, c'est rencontrer les gens, partager du temps et des histoires toujours un peu extraordinaires. Chaque histoire de chaque livre est une pièce du puzzle de sa vie.

Ici, il est question d'une promesse faite, à 11 ans, à son grand-père, anarchiste espagnol, en exil au Chili, d'aller un jour à Martos trouver ses racines andalouses.

Etre communiste sous la dictature de Pinochet signifiait recevoir un "billet pour nulle part" Nulle part, ce fut la prison de Temuco où Sepulveda séjourna durant 942 jours. Il y retrouva "presque la totalité du corps enseignant des universités du sud" et, ensemble, ils créèrent le "Grand Amphithéâtre de l'Athénée de Temuco" où ils échangèrent leurs disciplines respectives entre deux séances de torture. Libéré en juin 1976 à l'initiative d'Amnesty International, Sepulveda dut s'exiler mais il le fit par le chemin des écoliers, en sillonnant le vaste continent sud-américain.

Tout est prétexte à histoires ; que ce soit celle d'une gare de Patagonie où l'horloge, arrêtée par une balle perdue, marque à jamais neuf heures vingt-huit en souvenir de la rébellion de 1920, que ce soit à Machala (Equateur) où le lieu-dit La Olla est le dépotoir puant de millions de bananes impropres à l'exportation, que ce soit le souvenir de sa rencontre avec l'écrivain britannique, Bruce Chatwin,, grand amoureux de la Patagonie, qui n'écrivait que dans des carnets de moleskine, comme Céline et Hemingway, ou encore une simple soirée de concours de mensonges ou le transport d'un mort congelé dans un coucou pourri trop petit pour le corps. Tout est bon pour appeler la liberté par son nom, pour boire jusqu'à plus soif, du moment que chacun donne le meilleur de lui-même..

Une autre histoire étonnante est celle de cet ancien professeur d'université de Buenos Aires que son passé nazi fit se perdre en Patagonie sous un nom espagnol et qui, le premier, en 1980, découvrit un trou dans la couche d'ozone. Ses travaux, vérifiés et attestés par les autorités scientifiques adéquates, reçurent le prix Nobel alternatif de physique en 1988. A défaut d'adresse valable, il ne fut pas honoré mais, de toutes façons, il hurlait à qui voulait l'entendre : "Dites à tous ces connards d'arrêter la pollution atmosphérique avant de décerner des prix. Les prix, c'est pour les reines de beauté".

Tous ces détours conduisirent finalement Luis Sepulveda à Martos, en Espagne, où grâce aux registres paroissiaux, il retrouva le plus jeune frère de son grand-père, vieillard cacochyme qui, quand il eut compris qui il était, s'écria : "Femme, apporte du vin, mon neveu d'Amérique vient d'arriver".

Avec Sepulveda tout commence et tout finit autour d'un verre. Celui de l'amitié et de la paix entre les hommes.
Commenter  J’apprécie          803



Ont apprécié cette critique (76)voir plus




{* *}