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Critique de hcdahlem


Au secours, mon hebdo change de ligne!

Hugues Serraf se met dans la peau d'un critique de cinéma dont l'hebdomadaire vient d'être racheté, entrainant une nouvelle ligne éditoriale. Incisif et drôle, c'est comme si Balzac avait rencontré Thierry Jonquet.

Toute ressemblance n'est pas fortuite, même si cette formidable plongée au coeur de la rédaction d'un hebdomadaire parisien n'est pas un roman à clefs. Et pour ceux que le jeu amuse, disons qu'Edwy Plenel pourrait très bien avoir servi ici de modèle à Léon Nykras, le directeur qui prend ses nouvelles fonctions. Et j'imagine que le personnage principal, en l'occurrence le chroniqueur cinéma, pourrait tout aussi bien être le double de l'auteur (la belle illustration de couverture de David Lanaspa venant conforter cette hypothèse).
Nous voici donc à l'heure des grandes manoeuvres qui vont faire tomber Vision dans l'escarcelle d'un capitaine d'industrie, bien décidé à transformer le magazine de gauche en tribune du néo-progressisme. L'oeil goguenard de notre journaliste aguerri regarde avec un certain intérêt la transformation en cours et la nouvelle maquette ne lui déplaît pas. Après tout, il ne se mêle pas de politique. Seulement voilà, la culture n'est pas en dehors du monde et le choix de ses chroniques doit aussi servir la cause. Et bien entendu, c'est là que le bât blesse.
Ayant longtemps travaillé au sein d'un hebdomadaire, il m'a été très facile de m'identifier à cet anti-héros, d'autant que dans mon cas, les débats ont conduit à la réduction puis à la disparition de la rubrique littéraire… Autre temps, moeurs identiques!
Mais foin de considérations personnelles et revenons au dernier juif de France. Au sein de la rédaction les événements s'accélèrent et les rebondissements s'enchaînent, si bien qu'on ne lâche désormais plus le livre. C'est le meurtre d'un rabbin à Sarcelles qui va cristalliser les débats, provoquer la prise de conscience. Et offrir à l'auteur l'occasion de nous livrer une savoureuse galerie de personnages. Comme dans un casting de cinéma, les premiers et les seconds rôles sont formidables, de la rédactrice en chef fraîchement nommée à la mère de sa petite amie. L'humour et le décalage entre les petites histoires et les grands problèmes font mouche! Quand par exemple l'antisémitisme rampant devient éclatant, quand on se rend compte que du sang juif coule dans ses veines, ce qui ne semblait jusque-là ne pas le préoccuper, pas davantage que ses collègues. Mais s'il oubliait pour un temps la filmographie de Woody Allen, ce serait peut-être pas si mal… Les comiques antisémites sont beaucoup plus amusants!
Et voilà comment une vie plutôt agréable se transforme en combat. Comment les petites routines du quotidien s'effacent au profit d'un engagement pour une liberté désormais bridée. Sous couvert d'une gentille farce, c'est bien à une analyse de notre société que se livre l'auteur. Sous couvert d'une critique au vitriol de la scène médiatique française, c'est bien à un réveil des consciences qu'appellent ces lignes. Il n'en reste pas moins que sont ici rassemblés tous les ingrédients du roman idéal pour les vacances. Hugues Serraf, c'est l'assurance de ne pas bronzer idiot !

Lien : https://collectiondelivres.w..
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