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Critique de lousalinger


J'ai entamé le cycle Pierre Siniac avec Sous l'aile noire des rapaces, un pur chef-d'oeuvre à la lisière du récit d'aventures, de l'épopée historique et du roman noir. Sous le charme d'une écriture riche, cocasse et cruelle, je me procurai Femmes blafardes. L'oeuvre matrice du polar bien acide, genre de prédilection de son auteur, qu'il a souvent revisité au gré de sa carrière d'écrivain méconnu (une injustice à réparer). Au delà de ses travaux couchés sur plusieurs centaines de feuillets, Siniac s'est également illustré dans le recueil de nouvelles où le macabre le dispute à l'ironie. Parmi lesquels Reflets changeants sur mare de sang, qui signe donc ma troisième excursion en terres "Sinaciennes".

C'est un peu le principe, on aura forcément sa préférence sur les sept petites histoires concoctées avec imagination (et pas mal de sadisme). Mon écueil paradoxalement sera que certaines chutes peuvent devenir redondantes à partir du moment où l'on a perçu le désamour de l'écrivain envers ses personnages. Cette réserve mise à part, les petites fables furent rapidement dévorées. Souvent écrites à la première personne (quoique la focalisation peut changer), le style est évidemment beaucoup plus concentré, et les stratagèmes cristallins jusqu'à ce qu'un élément imprévu (insolite plutôt) vienne embrouiller le tout. Trois d'entre elles reposent sur le canevas du tel est pris qui croyait prendre, d'où un sentiment de répétition derrière le plaisir à voir le piège tordu se refermer sur nos protagonistes.
Les bonnes surprises sont principalement celles qui poussent le bouchon le plus loin en termes d'humour noir. Elles fonctionnent très bien parce qu'elles sont toutes diablement humaines. Shadenfreude peut reposer sur une formule vue et revue, mais le ton et la chute en font une sacrée comédie noire. Dans un style plus empathique, le coup de patte du chat Bouboule est surtout un coup de griffe qui utilise le registre mignonnet pour mieux le retourner contre son petit monde. Derrière cela, le pauvre petit tueur à la face de cul de singe (la plus longue des nouvelles) retrouve la verve de ses prédécesseurs pour une mésaventure excentrique et mortelle. Les Vautours est la plus courte du lot, elle pourrait donc logiquement concourir au titre de la meilleure farce macabre. Sur ce terrain, elle est totalement odieuse par conséquent irrésistible. Je garde malgré tout une petite préférence pour la première nouvelle (qui donne son titre à l'ouvrage), un joli numéro d'équilibriste entre noirceur, tendresse et décalage. Une petite perle d'originalité.

L'ensemble se lit en une journée, c'est toujours relevé, méchant et bien écrit. le format se prête idéalement à de petites lectures pour titiller l'esprit pervers qui rôde en nous. Et comme Pierre Siniac n'est pas le dernier à envoyer ses personnages au casse-pipe, Reflets changeants sur mare de sang a tout de cet exutoire. Il renvoie à ces moments où l'on se réjouit du malheur d'un autre, de la chute d'un athlète en pleine performance à l'arrêt cardiaque de la belle-mère en passant par la dégringolade d'un handicapé moteur dans l'escalier. Si vous goûtez à ce genre de mauvais esprit, vous savez ce qui vous reste à lire.
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