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Critique de Aliceaupaysdesmecaniques


Johanna, Johanna… vous nous aviez déjà dupés dans Jamais avant le coucher du soleil : après sa lecture, nous avions tous vérifié si les trolls existaient vraiment, en nous demandant quelle leçon nous avions ratée en biologie pour manquer cette information capitale.

Et maintenant, voilà que je ne sais plus : y a-t-il eu des plans en Finlande pour stériliser les femmes rétives, les indépendantes, les difficiles, les mal peignées, en un mot, les « morlocks » ? Car tout de même, parmi les nombreux interludes qui ponctuent votre roman, il y a un article authentique, publié en 1935, qui parle de la loi réglementant la stérilisation : « une loi autorisant la stérilisation, pour des motifs sociaux et humains, des personnes qui amoindrissent la qualité de la population » ; « il est nécessaire de s'en remettre également à des mesures restrictives, à savoir empêcher la naissance d'éléments de moindre valeur ».

Johanna, vous avez décidément le chic pour nous embarquer dans des situations pas possibles : dans une colonie nazie sur la Lune dans un autre livre, ou ici dans la tête de Vanna (Vera). Vanna est une « morlock » (enfin disons « neutrelle » pour être polis) dans un corps d' »éloï » (enfin, de « fémine », donc). Une aberration, une impossibilité, puisque les deux sous-espèces de femmes sont très différentes, mais aussi car toutes les jeunes filles sont testées dès leurs 3 ans pour savoir à quelle espèce elles appartiennent. Seras-tu fémine ? Seras-tu neutrelle ? Tout dépend : si on te présente des jouets, prendras-tu le poupon ou le camion de pompier ? le peigne ou le pinceau ?

Et vous, qu'auriez-vous pris ?

Le camion ? Alors vous serez stérilisée, et vous deviendrez de la main d'oeuvre négligeable.

Le poupon ? Et vous êtes blonde ? Alors vous êtes une « éloï » – vous serez lancée sur le grand marché de la reproduction, on vous inculquera tout ce que doit savoir une parfaite ménagère, et vous n'aurez qu'un seul rêve : le mariage. Toute votre existence n'aura qu'un seul but : « favoriser par tous les moyens le bien-être du sexe masculin ».

Johanna, décidément, vous ne perdez jamais votre regard d'ethnologue sur vos contemporains. Vanna doit, en bonne éloï, se maquiller, se farder, porter des talons hauts. Elle ne peut pas y déroger, de peur de trahir sa nature profonde de morlock. Et elle déteste ça.

Johanna, vous êtes très fine, vous savez voir le paysage dans son ensemble : les hommes aussi sont répartis en deux sous-espèces, dont celle qui est tolérée par la société est : « les virilos ».

Johanna, vous avez un talent très appréciable : vous êtes drôle. Finement drôle, parfois franchement drôle. C'est peut-être la différence entre La servante écarlate de Margaret Atwood et ce roman, Avec joie & docilité : ces deux excellents romans décrivent un monde terrible, des dystopies machistes où les femmes sont totalement sous contrôle, mais le vôtre est plus abordable car il est drôle.

[Suite et fin de la chronique sur le blog Les mécaniques imaginaires]
Lien : https://lesmecaniquesimagina..
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