AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de djdri25


Ce roman est une autobiographie. Vanessa Springora raconte comment adolescente, elle a été séduite par l'écrivain Gabriel Matzneff ainsi que les ravages provoqués dans sa vie future par cette relation. Elle revient sur son histoire, son enfance, son amour et ses relations familiales avant de revenir sur l'emprise dont elle a été l'objet.
Pourtant dès l'âge ; de 5 ans, elle n'attend que l'amour.
Mais dès l'enfance, celui du père est absent, comme elle l'écrit au début de son témoignage. Il se réduit à une sorte de fantôme, elle se souvient seulement d'élément épars lui appartenant ; des objets tels une cravate, un parfum, une senteur de parfum mais pas un être aimant incarnant la figure du père.
Les parents ne s'entendent pas, il n'y a aucune tendresse entre eux. Ils divorcent très tôt dans son enfance, elle vit avec sa mère et conservera très peu de relations avec son père.
Son enfance lui donne une vision particulière de l'amour ou plutôt le non-amour entre adultes ; un père peu fiable, violent, qui invoque la baise en place de l'amour, les ébats amoureux et traumatisants de sa mère, le manque de tendresse lors de sa découverte des plaisirs sexuels avec un ami d'enfance, sa précocité sexuelle.
Elle n'est du coup pas armée pour affronter les pervers sexuel.
Elle témoigne d'abord de sa rencontre avec l'écrivain sulfureux au physique avenant qu'elle appelle G, elle confond alors amour paternel et prédation. Elle raconte la fascination que celui-ci exerce sur elle aux premiers instants de leur rencontre, pour cette fille qui ne vit que dans les livres et qui vénère les écrivains dont elle a une vision idéalisée et naïve.
Plusieurs éléments rendent cette tragédie inéluctable, au départ oui, c'est « le consentement » puisqu'elle aime comme le dit V. mais la narratrice a une vision brouillée de cette relation, elle se sent belle à travers son regard à lui, elle, la jeune fille qu'aucun homme n'a jamais regardée ou réellement aimée, pas même son père. G la regarde comme personne ne l'a jamais fait auparavant. Elle est amoureuse mais son histoire familiale et sa jeunesse ne lui permettent pas de savoir ce qu'est l'amour, de faire la différence entre amour et fascination littéraire, amour et admiration de l'aura de l'écrivain, mais le pire pour elle c'est qu'elle va consentir et l'aimer. Sa mère l'avertit brièvement qu'il est connu pour être pédophile, la jeune fille ne l'entend pas, elle l'aime sincèrement et ne voit pas en lui le prédateur sexuel. Finalement la mère comme des membres de l'entourage vont tolérer cette relation, il n'y aura pas de réel barrage à cette relation. L'homme pervers la manipule à sa guise lui donnant l'impression qu'elle est « l'élue », c'est une lune de miel, de fiel, permise involontairement bien sûr par le manque d'affection et d'attention des ascendants de l'adolescente. La culture littéraire qu'il lui apporte est centrée sur la sexualité empreinte de pédophile et de viols de jeunes filles par des artistes, il réfute les faits. le contexte social et familial de l'époque, à la fin des années 70, ne vont pas être aidants. Personne n'y trouve à redire car c'est l'époque où « Il est interdit d'interdire », aucun rapport avec les scandales qui aujourd'hui parsèment la littérature et le milieu culturel.
Après l'abus sexuel, c'est le harcèlement par G que V va subir lorsqu'il publie leurs correspondances sous forme de fictions, il se dédouane du tort qu'il lui fait et se contrefiche d'un quelconque respect de sa vie privée en revendiquant le droit à la fiction, seule chose qui compte pour lui en dehors de ses déviances sexuelles. Ceci est d'autant plus dramatique que V a du mal à gérer son statut de victime puisqu'elle était consentante.
Puisqu'il y'a prescription pour l'abus sexuel, que le droit à l'image et à la vie privée ne peuvent être défendus, Il reste l'écriture pour écrire sa propre histoire et devenir comme Vanessa Springora le dit si bien, le sujet légitime de sa propre histoire.
Il est difficile et délicat de faire une chronique de ce livre dans lesquelles sont racontées des choses complexes, on est confronté à la morale, la justice, la révolte et toutes les autres vindictes, personnellement les cercles littéraires qui soutiennent encore Matzneff avec la distinction fallacieuse entre l'homme et l'artiste me révulsent.
Le livre est écrit d'une belle plume, celle que Matzneff a refusée à Vanessa Springora dans sa jeunesse, il était alors seul écrivain à bord dans cette relation malsaine.

Pour ceux que ça intéresse, il est possible de visualiser l'extrait de l'émission -Apostrophe- de Pivot (en 1990) que l'auteure cite dans son livre et dans laquelle Matzneff est présent. On peut se faire une idée du personnage.

Commenter  J’apprécie          312



Ont apprécié cette critique (29)voir plus




{* *}