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Critique de thedoc


Récit d'une emprise, l'histoire de la petite V. - Vanessa Springora, l'autrice - est désormais connue de tous. Gamine de 13 ans abandonnée par son père, délaissée par sa mère, V. est en manque d'amour et de figure paternelle. Lorsqu'elle rencontre G., écrivain quinquagénaire à succès et admiré du monde littéraire, et que celui-ci lui témoigne de l'intérêt, c'est pour V. le début d'une histoire d'amour et de fascination. Il faudra trente ans à Vanessa Springora pour pouvoir témoigner de cette relation toxique et dénoncer publiquement les agissements pédophiles du désormais bien connu, Gabriel Matzneff.

Au-delà de son histoire personnelle, c'est bien plus le regard que porte Vanessa Springora sur une époque et un milieu fermé - et le récit qu'elle en fait - qui happe le lecteur. Les pratiques perverses et criminelles de Gabriel Matzneff étaient connues de tous. du moins de ses amis, proches du monde littéraire, d'un milieu bohème et artistique. Est-ce vraiment le fait d'une époque dite complaisante et d'une évolution culturelle où au nom de la libération des moeurs et de la révolution sexuelle, on se doit de défendre la jouissance de tous les corps jusqu'à la confondre avec des pratiques pédophiles, qui ont permis cette acceptation ? "Il est interdit d'interdire !". Est-ce l'aveuglement de la notoriété et la posture d'artiste qui ont fait que des adultes ne voyaient pas où était le mal à cette relation considérée comme un petit écart, à commencer par la mère de Vanessa ?
Aujourd'hui, si tout cela paraît ahurissant, Vanessa Springora prend le temps de poser ces questions qui, en partant de sa situation personnelle, touchent à la moralité de l'oeuvre et à ce que l'on est prêt à accepter au nom de la "littérature" et de la création artistique.

Dans un style sans ambages, nuancé et circonstancié, elle relate ce qui a été - la toile tissée par un prédateur, soutenu non pas seulement par des proches mais par tout un milieu littéraire, culturel et politique - et questionne : comment des gens dit "intellectuels" en sont arrivés à confondre liberté sexuelle et pratiques pédophiles dont l'auteur se vantait publiquement ? Comment ne pas voir que derrière l'écrivain qui relate ses pseudo succès sexuels se cache un pervers narcissique ? Vanessa Springora s'interroge aussi forcément sur les notions de victime, de vulnérabilité, d'abus de faiblesse... tout ce qui repose dans cette zone grise où l'on est à la fois victime, coupable et consentant.
"Le consentement" est une oeuvre aboutie, d'une très grande justesse, sans aucun voyeurisme mal placé. A lire absolument. Et bravo Madame Springora.

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