Elle finit par revenir, n'est-ce pas ?
Elle réalise que quitter ses devoirs d'épouse est un acte illégal ?!
Mais oui, nous prendrons des noms de plumes. Des noms neutres, pour qu’on juge nos écrits avant de nous juger comme femmes.
Nous savons si peu qui nous sommes. Et encore moins qui nous serons.
De ma soeur, qui me considère comme l'oiseau fragile, et qui ne voit pas en moi le corbeau que je pourrais devenir.
Mais tu imagines ? Exposer ce que des jeunes femmes, comme nous, ont vécu au sein de ces familles... Ce serait totalement nouveau.
Voilà plus d'un an que mes soeurs et moi avons recommencé à écrire, en vue d'être publiées. Et moi qui ai si longtemps douté de notre avenir, j'ai enfin vu un chemin se dessiner pour nous. Mais je prends conscience aujourd'hui que ce chemin ne vaudra rien tant que nous ne pourrons écrire avec nos propres noms sans crainte... Que nous ne pourrons être artistes sans l'autorisation de notre père... Et que notre subsistance dépendra du bon vouloir d'un critique malveillant. Alors malgré la peur de Charlotte, il me faut aller plus loin qu'avec Agnès Grey, et murmurer au public quelques vérités bien senties. Parler de ces maîtres et de leur ascendant sur leurs épouses. De notre manière d'éduquer nos fils. De ce frère qui erre à l'étage de notre maison. De ma soeur, qui me considère comme l'oiseau fragile, et qui ne voit pas en moi le corbeau que je pourrais devenir.
Quelle est notre place ? Ne serons-nous jamais plus que des filles de pasteur ? Quelle autre voie que de devenir gouvernantes ou épouses, si par miracle nous rencontrons un homme bon ? J’aurais aimé un autre destin.
C'est certainement étonnant de décrire une femme comme un être humain en littérature, je vous l'accorde.
Continue de douter. Sans quoi, tu deviendras aussi arrogante et aveuglée que Branwell.
Depuis ta prose inspirée de Gondal jusqu'à aujourd'hui, tous semblent provenir d'une voix qui a déjà tout vécu.