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Critique de Eric75


Eric75
14 décembre 2015
Une fois n'est pas coutume, je commence par un extrait (que j'espère, vous apprécierez à sa juste valeur).

Extrait : « Question : Qu'est-ce qui voyage plus vite que la lumière ?
Réponse : le temps lui-même.
Il nous traverse comme une flèche. Sa pointe acérée fend la chair, les organes et les os, c'est la vie, l'instant d'après, cette pointe ressort en empruntant le même chemin, c'est la mort.
Plus vite que la lumière. Il suffit qu'il pleuve pour que passent dix années. Un battement de paupières et vous vieillissez, la nuit de la mort surplombe les montagnes. Le temps va si vite, mais parfois si lentement que, presque, nous suffoquons. Nous sommes à la fois la tortue et le lièvre, arrivons à la fois premier et bon dernier, c'est à n'y rien comprendre. Alors nous disons simplement : Elle a ôté sa robe. »

Comme vous pouvez le constater, c'est du charabia.

Et ce n'est qu'un exemple parmi d'autres. Tout est comme ça, la lecture de ce livre, qui n'a ni queue ni tête, a été pour moi un vrai calvaire.
Déjà, avec ce titre en queue de poisson, j'aurais dû me méfier...
Alors, comme ça, le temps voyage plus vite que la lumière ? Parce que le temps voyage ?
Et la flèche du temps, elle, vous traverse et fait demi-tour pour emprunter le même chemin après avoir mis le bordel dans vos organes internes, et peut-être aussi dans votre cerveau tant qu'à faire ? (Un peu comme la balle de Lee Harvey Oswald et son trajet tortueux dans le cerveau de JFK).
Alors il pleut et paf ! Dix années de passées ! La vache ! Mieux vaut ne pas passer ses prochaines vacances en Bretagne ! Mais c'est sans compter la nuit de la mort qui surplombe les montagnes (montagnes qui à d'autres moments, poussent des cris...) Quant aux poissons, eux, ils n'ont donc pas de pieds… Mais oui, mais oui… Existe-t-il une explication à tout cela ? Oui : elle a ôté sa robe ! Et ça provoque des hallucinations graves et des malaises vagaux, n'en doutons pas un seul instant. Nous suffoquons, dit le narrateur. Mais le lecteur, lui, est déjà noyé. Car c'est à n'y rien comprendre (sic).
Et sinon, l'hôpital psychiatrique de Reykjavik, c'est de quel côté ?

Tout cela a mal commencé. Un livre non reçu dans les temps (reçu le jour même de la rencontre avec l'auteur, donc impossible à lire avant les échanges qui devaient avoir lieu). Un rendez-vous prévu le lundi suivant les attentats du 13 novembre, dans le quartier même des fusillades, que j'ai dû décommander au dernier moment. Un rendez-vous manqué avec l'auteur… et avec le livre.

Car il m'est arrivé un truc bizarre… Après avoir lu un peu plus d'une centaine de pages, par petits bouts, je me suis rendu compte à un moment donné que je n'avais aucun souvenir de ce que j'avais déjà lu... Quelle impression étrange... Esprit ailleurs ? Fatigue ? Manque d'attention après les attentats de Paris ? L'histoire en elle-même ne semblait pourtant pas si compliquée, puisqu'il ne s'y passait pas grand-chose, enfin, pas grand-chose pouvant retenir mon attention… Mais comment ai-je pu zapper autant de contenu ? N'y avait-il aucune anecdote, aucun personnage, aucun fait digne d'intérêt dans ce récit ? Plus aucun souvenir… Tout était donc oublié, parti en fumée, rien ne s'était imprimé dans ma mémoire, je me suis surpris à me demander qui étaient ces personnages, quels étaient leurs liens de parenté, qu'avaient-ils fait depuis le début du récit ? Au bout de plus de cent pages de lecture, je ne comprends toujours pas ce que veulent les protagonistes du roman, je n'arrive toujours pas à me représenter les paysages islandais malgré les nombreuses descriptions, je ne sais toujours pas qui est le narrateur ou si son identité a été révélée puis oubliée en route, je ne comprends toujours pas où l'auteur veut nous emmener...

Aux grands maux, les grands remèdes, n'écoutant que mon courage, j'ai alors entrepris de tout relire depuis le début, pour identifier les potentiels éléments qui m'auraient échappé lors de la première et laborieuse lecture... Il fallait bien pouvoir raconter deux-trois trucs dans ma future critique…

Première confirmation, le style de l'auteur est (pour moi) insupportable de prétention et de digressions inutiles, c'était donc bien pour cette raison que j'ai dû somnoler puis m'endormir en route, sans doute bercé par son baragouin amphigourique.

Au bout de cent-quatre-vingts pages (je suis parvenu à aller un peu plus loin à la deuxième lecture), je dois me résoudre à ce cruel constat : il va falloir encore s'accrocher davantage si je veux arriver au bout… Masse critique oblige, je m'accroche.

Au bout de deux-cents pages, je comprends qu'il s'agit d'un grand roman d'aventures sur la vie, la mort, tout ça, et je parviens - enfin - à mémoriser au moins deux choses importantes : 1) un type, le narrateur, dont on ne connaît toujours pas l'identité, ni les étranges motivations, parvient à tromper sa faim et son ennui en commandant un burger et une barquette de frites servis au cul d'un camion stationné sur un parking désert, il attend l'arrivée de Ari (son pote ? son frère ? son cousin ? mystère), a-t-il pris du ketchup ou de la mayonnaise ? Nous n'en saurons pas davantage ; 2) un autre gars, le dénommé Ari justement, débarque d'un avion, passe la douane et, contre toute attente, un méchant douanier l'oblige à se déshabiller entièrement et lui fait subir une fouille rectale bien profonde. Le douanier pervers s'avère être son cousin, ils se reconnaissent au cours de cette touchante scène intime et poursuivent leur conversation comme si de rien n'était, mais arrivé là, à ce stade, le lecteur s'en fout un peu. Quand Ari rencontre Salo, on bascule sur les 120 journées de Sodome and go more… On apprend que l'ex de Ari l'a dénoncé, par pure vengeance. Moralité : méfiez-vous de vos ex et de vos cousins douaniers.

J'en suis là… Pas plus convaincu que ça (je vous l'accorde) qu'il faille poursuivre cette laborieuse lecture jusqu'au bout. En tout cas, pressé de publier car l'heure du gong signalant la fin du délai de publication de cette Masse-Critique-Rencontre-Ratée approche, j'arrête ma critique ici, je pose le stylo et je rends ma copie.

Peut-être provisoirement, sait-on jamais, je reviendrai à l'antenne si besoin pour vous signaler tous faits nouveaux susceptibles de modifier mon présent avis et survenant dans les 240 pages qu'il me reste encore à lire.

A condition, bien sûr, de trouver des trucs suffisamment croustillants et dignes d'intérêt. Je lis comme du scepticisme dans vos regards et j'entends d'ici vos ricanements sous cape. On peut, en effet, douter de la chose. Mais si ça tombe, avec un auteur pareil, disposant d'autant d'imagination et de ressources poétiques imprévisibles, je vais peut-être apprendre d'autres trucs dingues sur les douaniers et sur l'Islande, à la faveur d'un renversement de situation remettant en cause les certitudes jusqu'ici chèrement acquises, comme par exemple, tenez, peut-être que le temps, finalement, voyage moins vite que la lumière et que les poissons, finalement, ont des pieds. Je trouve d'ailleurs l'auteur bien affirmatif et bien sûr de lui dans le choix de son titre…
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