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Critique de chocobogirl


Entre ciel et terre, entre vie et mort, le fil est ténu. En cette Islande de 1850, la vie s'écoule, immuable, au rythme de la mer et de ses pêches à la morue, une des rares ressources disponibles sur cette terre gelée où rien ne pousse. Au printemps, les pêcheurs s'entassent dans des baraquements en bois où promiscuité et froid leur tiennent compagnie, loin de la ville et de leur famille. Nous y suivrons deux hommes : Bárður et son compagnon adolescent, « le gamin », dont nous ne connaîtrons pas le nom. Équipiers dans l'équipe de Petur, ils se distinguent par leur amour des livres et des mots. Un amour qui coûtera cher à Bárður. Plongé dans la lecture du Paradis perdu de Milton, ce dernier en oublie sa vareuse, avant de prendre la mer. Mais quand le vent monte au creux de la chaloupe et que le froid se fait déchirant, Bárður se meurt de froid devant ses compagnons impuissants. Il n'en fallait pas plus au gamin qui haïssait la mer, déchiré par la perte de son seul ami, de tout quitter et décider de retourner à la ville rendre le livre coupable à son propriétaire.

Voilà un roman âpre qui ne se laisse pas facilement apprivoiser. Il faut prendre le temps de pénétrer ces existences dirigées par la mer et le poisson. Une vie rude, à l'écart de toute chaleur, de toute civilisation et qui réclame constamment son tribut de morts. le gamin tente de fuir tout ça pour mieux aller à la rencontre de la mort.
Il pense au suicide qui le libérerait. Il pense aussi à cette fille qui lui plaît mais ne le regarde même pas. Mais sa route aboutira à d'autres rencontres : une tenancière de bar hospitalière, un vieux capitaine de bateau devenu aveugle d'avoir trop lu et des livres, encore. Ceux dont il fera la lecture et qui lui sauveront peut-être la vie après avoir tué son ami.

Entre récit initiatique et fable métaphysique, Entre ciel et terre emporte son lecteur avec lenteur et fracas. Dans une langue magnifique que le traducteur a su rendre à la perfection, il nous livre ce monde où les vivants ne sont que des morts en sursis. A travers l'histoire de Bárður et du gamin, il nous rappelle combien la mort fait partie de la vie, combien sont importants les rêves et l'espoir, combien l'homme est une part infinitésimale de cet univers entre ciel et terre. Et qu'il doit lutter pour mieux comprendre le sens de la vie.

Le roman de Stefansson est véritablement hypnotique. La langue extrêmement poétique de l'auteur, les paysages islandais magnifiés, ce souffle qui vous prend aux tripes et vous retourne le coeur, cette importance de l'infime qui lentement se révèle être l'essentiel. Tout concourt à faire de ce roman une oeuvre hors du temps, inoubliable, qui oscille entre tragique et espoir, montrant à la fois la rudesse du pays et cette humanité parfois douce qui transpire du coeur des hommes.
Lien : http://legrenierdechoco.over..
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