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Critique de Perlaa


Si vous avez lu la Vie obstinée de Stegner vous vous souvenez du personnage principal. Ce vieux ronchon ! Vous savez ce personnage qu'on adore détester.
Ici c'est Lyman. Il a été amputé et est cloué dans un fauteuil roulant. Son fils pragmatique et anxieux, ne rêve que de le placer à la maison de retraite de Menlo Park, « là où l'on met les vieux au vert ». C'est mal connaître Lyman. Historien et professeur émérite il a un projet, vivre dans la maison de ses grands parents et y rédiger le récit de leurs vies « pour éviter d'avoir à trop se pencher sur la sienne ».
A partir de lettres, de coupures de presse et de beaucoup d imagination, Lyman va retracer un peu plus d'une vingtaine d'années d'un couple de pionniers.
Susan, la grand-mère, quaker, bourgeoise, fière et artiste mariée à un ingénieur réaliste, taciturne, doué et sérieux définitivement peu doué pour les affaires.
Une vie dans l'Ouest entre 1870 et 1890 à l'époque où tout était à construire, des mines à évaluer, des canaux à percer, des terres à irriguer, souvent avant l'arrivée du train. Une vie de privations, de déménagements, d'espoirs et des déboires. Une vie où Susan emportait sa tradition avec elle dans l'inconnu culturel. Deux personnes qui vécurent debout, ensemble.
C'est beaucoup plus qu'une histoire de l'Ouest ou un livre d'aventures. C'est plus qu'une échappatoire, c'est la quête personnelle d'un biographe qui s'efforce de descendre à la racine d'un malheur non expliqué. L'histoire est rédigée avec le recul temporel de Lyman. Il s'agit de découvrir comment ce couple si dissemblable resta soudé l'un à l'autre, « dévalant la pente de leur avenir ». C'est aussi pour Lyman la volonté farouche de prouver qu'il est capable de mener de front une oeuvre ambitieuse au nez et à la barbe de sa famille condescendante.
Le récit entrelace la vie au XIXème siècle et les démêlés de Lyman avec son entourage à la fin des années soixante. Très belle réussite ces passages de paix armée avec sa famille et surtout ses querelles avec son assistante improvisée la jeune Shelly, si énervante et si aguichante à la fois. Elle l'emmène là où il ne veut plus aller.
Lisez jusqu'au bout ce pavé qui fut couronné du prix Pulitzer en 1972 jusqu'à la suprême récompense. Une scène superbe s'installe subrepticement à pas feutrés et dynamite tabous et bon goût.
Stegner ose tout. Il alterne mélancolie, doute et mauvaise foi jubilatoire. Un grand sentimental qui ne veut pas se l'avouer.
Il joue de sa dextérité pour faire de son lecteur sa victime consentante.



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