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Critique de Yokay


Pour ceux qui n'auraient pas la référence, l'Origine du monde est un tableau de Gustave Courbet peint en 1866 qui montre, sans fausse pudeur ni obscénité, le sexe (et accessoirement le ventre et un sein) d'une femme allongée, jambes ouvertes. Il est visible au Musée d'Orsay. Une fois qu'on a l'image en tête, le thème est clair : le sexe féminin.
Il me vient soudain une question : est-ce que Liv Strömquist a été ou non dans l'obligation, par son éditeur, de cacher pudiquement son sujet sur la couverture de sa bande dessinée pour pouvoir la vendre en rayon grand public sans être accusée de pornographie ? A-t-elle eu la liberté, le choix de sa couverture ?
Car comme on l'apprend dans l'ouvrage, depuis la fin du siècle des lumières (fin du 18e siècle), l'ombre est tombée et l'opprobre a été jeté sur ce que le tableau de Gustave Courbet ne cachait pas, sur ce sexe en tant qu'organe à part entière, avec sa partie externe visible et sensible, ainsi que sur les sujets connexes d'orgasme féminin, de menstruations, toutes ces choses que les hommes « sachants » se sont employés à dénigrer, afin de maintenir les femmes sous leur emprise. Et on commence à peine à en sortir progressivement, plus de 200 ans après… Alors que dans d'autres civilisations, plus anciennes et plus « primitives » selon notre conception du monde auto-centrée, ces éléments font partie du sacré.
Cet ouvrage fait partie des pavés dans la mare, des points sur les i, qui dénoncent et affichent publiquement les mutilations, les manipulations, les aberrations pseudo-scientifiques, que le sexe qui s'est auto-proclamé « fort » a infligé à celui qu'il a désigné « faible ». Et c'est affligeant de bêtise, d'obscurantisme, de suffisance.
Un pavé, c'est aussi le terme qui convient au style graphique de la BD : pas hyper volumineux mais dense ! En noir et blanc (pas mal de noir) sauf quelques exceptions bienvenues (un chapitre coloré, un autre avec le sang en rouge), beaucoup beaucoup de texte au point qu'il rentre à peine dans les cases, quelques redites entre le texte et les phylactères qui n'apportent rien (surtout pas de légèreté). Pas de pagination, pas d'air, un chapitrage pas clair. C'est parfois lourd, il ne faut pas se mentir. Pour peu qu'on souhaite le faire lire à une personne pas totalement convaincue a priori qu'elle est concernée par le sujet, ce n'est pas en l'ouvrant qu'elle va se dire « waouh, ça a l'air chouette ». Ça dessert l'objectif d'une diffusion la plus large possible, c'est dommage.
Ce qui sert le propos, par contre, c'est l'humour caractéristique de Liv Strömquist, son côté cash, rentre-dedans, caustique.
Un ouvrage à lire, à faire lire, absolument, malgré son abord peu sexy. Halte aux tabous, idées reçues, mensonges, tous phallocentrés.
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