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Critique de afriqueah


Découverte enchantée :
Après  Des fleurs pour Algernon, beaucoup d'entre vous m'ont conseillé un autre livre de SF, et Anna, @annaCan m'a aiguillée vers : Cristal qui songe.
Alors, alors !
de quoi parle Théodore Sturgeon, en 1950, dans son livre ?
Loin de moi l'idée qu'écrire en 1950 est daté, parce que, précisément, non, nous ne pouvons pas rêver plus actuel.

L'histoire ? Un enfant martyr, dont la seule richesse réside en un diable en boite surgissant sur son ressort. Horty y tient, à ce diable, mais personne ne rit (comme Bergson dans le rire, pensant que la répétition de sa sortie subite est une des caractéristiques du rire). Il y tient tant qu'il en meurt presque lorsque son père adoptif jette le jouet à la poubelle et, pauvre type, piétine ensuite le diable et coince trois doigts d'Horty dans une porte.
Piétiner un diable !
le mal en personne.
Horty se sauve, et est recueilli par des petits comme lui, en réalité des nains travaillant dans un cirque. L'une, Zena, qui le cache et le protège, lorsqu'elle voit qu'il possède un double sens, une intuition peu commune, lui invente un passé et la transforme en sa jumelle, devant leur chef, Ganneval le Cannibale, haïssant le genre humain, misanthrope absolu et cependant avec un fond de douceur.
Ce monstre social aperçoit deux arbres absolument semblables, qui semblent doués d'une volonté de rester semblables, y compris lorsqu'une des branches de l'un est coupée, la blessure apparait sur l'autre : « Il s'aperçut alors que des enduits superficiels, comme de la peinture, ou des apports extérieurs, comme un morceau de bois cloué dans l'écorce des arbres, ne se modifiaient aucunement. Mais tout ce qui affectait les tissus mêmes de l'arbre, comme une entaille, une écorchure, une lacération, un trou de vrille, se trouvait reporté magiquement de l'arbre A à l'arbre B.
L'arbre A était l'original. L'arbre B une espèce de... de copie... » 
Ganneval, après recherches et/ou glissement progressif vers la folie, découvre sous l'arbre B un cristal et établit un contact psychique avec lui.
Voilà : le cristal est un être vivant (nous connaissons le pouvoir des pierres, chacun ayant sa pierre de prédilection et de protection).
Pourtant, ce que fait Gannelan, c'est de projeter sa haine sur la pierre, par désir de pouvoir, par peur de ne pas comprendre, par envie de faire souffrir. Parce qu'il reconnait le pouvoir des pierres.
La pierre crie.
de ce rapport sadique, la conclusion ressort : les pierres rêvent. (Le titre en anglais : « The Dreaming Jewels » est bien entendu plus parlant, puisqu'il s'agit de la force de certaines pierres qui rêvent et copient les êtres existant.)
« Leurs rêves ne sont pas des pensées, des ombres, des images, des sons, comme les nôtres. Ils sont faits de chair, de sève, de bois, d'os, de sang. Et il arrive même que leurs rêves restent inachevés ».
Les pierres vivent sur la terre depuis des millions d'années, elles s'expriment entre elles, elles pensent, elles pensent sans rien vouloir.

Ai-je aimé ce rapport pervers du Cannibale avec des pierres innocentes ? Il suscite certes du dégoût, mais il révèle plus qu'il ne détruit. Et rompt avec les idées reçues de la vérité immuable, alors que la nouveauté de la pensée, penser pour la première fois est beaucoup plus riche (comme, par exemple, découvrir la SF grâce aux conseils amicaux d'Anna).
J'ai aimé encore plus lorsque l'auteur cite Descartes «  je pense donc je suis ». Descartes, sans doute le philosophe le plus méconnu qui soit, qui se décrit lui-même « marchant seul et dans les ténèbres », faisant table-rase de toutes les connaissances admises, doutant de tout… sauf de sa propre pensée. Et qui analyse, et fait connaitre à sa fille Francine les automates, (les diables en boite ?) et leur rapport avec les êtres humains.
Voilà, j'ai adoré, car je crois que, même si le pouvoir des cristaux aide, la force de la pensée, la concentration de toute l'énergie mentale peut vraiment beaucoup pour l'humanité.
J'ai adoré la manière de nous faire entrer dans la psychologie de chacun des personnages, l'histoire peut-être pas si folle, car les pierres créent mais parfois de façon imparfaite, d'où les nains- lorsque leurs rêves n'aboutissent pas- enfin le concept de transmission de pensée.
J'ai admiré cette hypothèse des cristaux créateurs, exposée parfois à la manière d'un thriller, tout suggéré, rien dévoilé, dont je ne peux, pauvre humaine normale, que donner un tout petit aperçu.

Coup de coeur, ravissement de la pensée.

Une dernière question : dans ta généalogie, Anna, vu la prescience de tes conseils, es-tu sûre qu'un joli cristal ne serait pas intervenu ?

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