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Critique de babel95


Bizarrement, c'est grâce à un de ses ouvrages les moins connus, Mon Année, portrait d'une petite fille trisomique réalisé en 2009 avec Jean-David Morvan, que j'ai découvert pour la première fois l'oeuvre de Jiro Taniguchi.
C'est Quartier Lointain, lu dans le cadre de la lecture en commun de juin, qui m'a permis de me plonger de nouveau dans l'univers si particulier des mangas de Taniguchi.
L'action de Quartier Lointain, paru en 2002-2003, se déroule en avril 1998 ; le manga nous raconte l'histoire d'un employé, Hiroshi Nakahara, comme il en existe tant au Japon. Agé de quarante-huit ans, père de deux petites filles, à la sortie du travail, il fréquente les bars. Ce soir-là, en déplacement à Kyoto, la fatigue, l'alcool... peu importe, Hiroshi se trompe de train, et au lieu de rentrer à Tokyo, se retrouve très loin, en province, dans la petite ville de son enfance... Sur la tombe de sa mère, il se retrouve projeté dans son passé, il reprend sa vie d'adolescent de quatorze ans, cette année-là, alors qu'un événement va bouleverser sa famille et changer son destin....
Hiroshi, adolescent possédant la conscience et la connaissance de l'adulte va-t-il pouvoir changer le cours de sa vie ?
Quartier Lointain nous dépeint le Japon de l'après-guerre et la reconstruction, à travers la vie d'une famille ordinaire. La guerre et les souffrances qu'elle a entraînées sont omniprésentes, bien que tues. Les membres de la famille tentent tant bien que mal de continuer à vivre, alors même que le sens de cette vie nouvelle semble leur échapper. La maladie, la mort, le renouveau sont dépeints avec sobriété... de même que "l'évaporation" cette façon de s'enfuir "à la japonaise", de tout quitter pour échapper à un quotidien oppressant, sans avenir, que l'on n'a pas choisi.
Cette quête de liberté nous interpelle plus particulièrement, nous les Occidentaux,et elle est remarquablement illustrée par la plume de Taniguchi, ses dessins précis, sa reconstitution minutieuse du Japon de l'enfance, l'expression des sentiments de ses personnages.
"Personne ne devient vraiment adulte. L'enfant que nous avons été est toujours là, bien vivant, tout au fond de nous", telle est finalement la constatation du personnage principal.
Au terme de son périple dans le temps, que va-t-il advenir du Voyageur du passé ?
Un beau manga, une belle histoire qui nous fait réfléchir sur les conflits armés et tous les destins brisés, mais aussi sur notre propre histoire, notre enfance et l'homme ou la femme que nous sommes devenus.

Jiro Taniguchi vient de nous quitter, le 11 février 2017.
Dans un article du Monde paru le mardi 14 février, Frédéric Potet parle de la "narration lente et apaisée" d'un dessinateur de l'impalpable".
Ces quelques mots rendent un très bel hommage à un mangaka au style inoubliable.

TaniguchiSan, aligato.

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