Citations sur Braves bêtes (12)
L'autrice et opposante politique indienne écrit ceci : "Il n'y a pas de "sans-voix". Il y a des voix délibérément réduites au silence ou qu'on préfère ne pas entendre."
Contrairement à ce qu'on pourrait penser, les écrits du "père des droits des animaux" sont régulièrement utilisés pour légitimer le fait de traiter les animaux comme de la marchandise ou de les tuer. Son œuvre a popularisé un discours qui met en avant la souffrance, ce qui a eu pour effet de réduire le débat sur l'éthique animale à la nécessité de faire reculer la cruauté la plus extrême, plutôt que de dénoncer les causes systématiques de l'exploitation animale et de se demander de quoi les animaux ont besoin pour s'épanouir.
Je ne suis pas en train de dire que les animaux et les personnes handicapées souffrent du validisme de la même manière. Non, ce que je veux démontrer, c'est que le validisme est le ciment des systèmes qui dévalorisent autant la vie des bêtes que celle des humains handicapés, ouvrant ainsi la voie à un large éventail d'oppressions.
Le destin de Pastrana me permet de mesurer que si j'ai la possibilité et l'envie de me réjouir des métaphores animalières dont on me gratifie, c'est parce que j'ai le privilège d'être blanche et issue d'une classe favorisée. Les personnes handicapées ne sont pas égales face à l'animalisation. Pour certaines, être comparé à une bête n'est pas seulement insultant, c'est aussi un danger - celui de ne plus être considéré comme une personne.
Nous disons : "L'économie est paralysée" par des dysfonctionnements. Ou qu'une personne est "handicapée" si elle n'est pas capable ou pas en mesure de faire quelque chose. Nous parlons d'aveuglement pour désigner un comportement ignorant ou naïf. Ceux qui agissent stupidement, nous les traitons de "débiles mentaux". "Pas valide" est employé au sens de "pas valable".
De tels exemples sont souvent balayés d'un revers de main : ce ne sont que d'innocentes façons de parler... Mais les mots sont politiques.
On considère généralement que les animaux et les employés d'élevages industriels et d'abattoirs sont irréconciliables, les uns gagnants leur vie grâce à l'exploitation et parfois la mise à mort des autres. Mais leur vulnérabilité au sein de ces industries montre à quel point les humains, les animaux et les environnements qui les font vivre sont complètement jetables et remplaçables aux yeux de celles-ci.
Jonathan Safran Fort écrit : "Il n'y a pas assez de poulets d'élevage traditionnel en Amérique pour nourrir la population de State Island, ni assez de porc traditionnel pour alimenter New York, pour ne rien dire du reste du pays." les labels tels que "élevé en liberté", "élevé en plein air", "naturel" et "bio" ne disent souvent rien de la façon dont sont traités les animaux. Les industries qui se cachent derrière eux ont simplement trouvé ces parades pour vendre leurs produits, des produits qui ne sont, dans ce cas, guère plus que des moyens de soulager brièvement les consciences.
"Si décrire la souffrance des animaux le conduit à réclamer leur libération plutôt que de les euthanasier, se demande Triano, alors pourquoi préconise-t-il de tuer des nourrissons qui connaîtront à coup sûr une vie de souffrance plutôt que prôner des changements sociaux qui pourraient atténuer leur douleur ?"
Best met ici en lumière l'un des aspects les plus contradictoires de l’œuvre de Singer.
Il est urgent de mettre du crip dans l'éthique animale, en y intégrant une politique du handicap. Nous devons absolument passer au crible les oppressions communes aux animaux humains et non-humains, et comprendre ces systèmes et ces idéologies, car le validisme fait des dégâts bien au-delà de la linguistique. Intimement lié au spécisme, il nous éclaire précisément sur la façon dont les animaux non-humains sont jugés, catégorisé et exploités.
Une précision importante : quand les universitaires soutiennent que la notion de handicap est essentielle à la création des catégories de la différence, ils ne disent pas que le handicap prévaut sur des marqueurs comme la race, le genre ou la classe sociale, mais plutôt que le handicap est constitutif de plusieurs formes de différences.