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Critique de oiseaulire


Une femme jolie et encore jeune, a reçu d'un oncle enrichi un héritage consistant en une usine de deux mille ouvriers.

Issue elle-même de la classe ouvrière, elle se sent prise entre deux mondes sans appartenir à aucun. Elle n'a ni les codes, ni, croit-elle, les compétences de ses nouvelles attributions et de ses responsabilités de chef d'entreprise. Elle rêve de déposer son lourd fardeau entre les mains d'un homme qui prendrait les rênes de sa destinée.

Mais voilà : un noble dilapiderait sa fortune, lui dit-on (non sans raison pour qui connaît le monde de Tchekhov), un bourgeois l'affamerait dans sa propre maison en mettant sous clé son argent et son beurre, lui dit une autre. Tandis que son domestique lui représente l'humiliation de se produire dans le monde aux côtés d'un rustique ouvrier sans éducation et sans façons.

Son ami l'avocat lui conseille de ne jamais renoncer à son indépendance pour un homme, de se cultiver tout en se livrant à une "débauche" modérée et de bon ton, bref de "profiter de la vie", puisque son statut le lui permet désormais, rare privilège pour une femme.

L'héroïne est déchirée et le roman s'arrête là.

Pour ma part, j'imagine qu'elle continuera quelques années à mener seule son entreprise, acquérant au fil du temps le savoir-faire indispensable, d'autant qu'on devine dans l'ombre la présence d'un ancien contremaître de son oncle capable de la seconder et pour qui elle eut jadis un petit béguin ; puis qu'elle épousera ce même homme, comme elle en voie d'ascension sociale : un "rustaud" peut bien acquérir de bonnes manières s'il le désire vraiment... Ce sera une union fondée sur l'estime et un intérêt commun : la gestion d'une usine où tous deux sont passés du statut d'ouvriers à celui de dirigeants.

Sans doute une autre lectrice lui fera-t-elle contracter un mariage d'amour ? Ce serait follement romantique, et Tchekhov a laissé la porte ouverte. Mais on devine, à travers le personnage de l'avocat, son porte-parole littéraire, que l'auteur préfère Maupassant à Charlotte Brontë.



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