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Critique de Emnia


J'ai découvert il y a quelques mois le magazine Tempura, auquel je me suis rapidement abonnée. Tempura, dont la couverture ne manque jamais d'attirer le regard, constitue une porte d'entrée extraordinaire pour qui souhaite découvrir un pays dont la réalité s'efface trop souvent derrière les clichés. Sous-titrée « Un magazine sur le Japon », la revue explore la pluralité des cultures japonaises et fait découvrir le pays sous des angles multiples (société, littérature, beaux-arts, arts du spectacle, histoire, gastronomie, voyage…), souvent inédits et toujours originaux. Un numéro après l'autre, il me semble que ma vision du Japon gagne doucement en relief comme en subtilité.


Le magazine a été lancé au printemps 2020, avec les difficultés que l'on imagine. Long de 164 pages, le trimestriel, dense, bénéficie d'une maquette agréable et moderne. Les articles et rubriques sont nombreux et variés, les sujets traités en profondeur, les plumes diverses et de très bon niveau. J'aime beaucoup les choix d'illustrations, en particulier le fait qu'une partie des articles sont illustrés par des séries de photographies : ça permet à la fois une uniformité de style plaisante à l'oeil et la découverte de photographes japonais talentueux.


Chaque numéro comprend un dossier thématique d'une soixantaine de pages. L'objectif n'étant pas de prétendre à l'exhaustivité, ces dossiers sont constitués d'une constellation d'articles abordant chacun une facette du sujet, ce qui permet de maintenir l'intérêt du lecteur beaucoup mieux que ne pourrait le faire une synthèse qui risquerait en plus de n'être qu'un survol grossier et probablement indigeste.


Le dernier numéro paru, le cinquième, est consacré au corps et je pense que c'est pour le moment celui que j'ai préféré, même si tous mettaient la barre très haute. Il aborde notamment la passion du bodybuilding de l'écrivain Yukio Mishima expliquée par l'histoire du pays, ainsi que la difficile acceptation du handicap par la société et la question, douloureuse, des stérilisations auquel a poussé durant de trop longues années un idéal eugéniste. Il traite également de minceur imposée et de pudeur, de contraception et de maternité, et à travers ces thèmes à la fois de l'emprise malsaine exercée par la société sur le corps des femmes et de celles qui parviennent avec succès à s'en émanciper. Sont évoqués également la jeunesse non-binaire ainsi que les spécificités de la pornographie japonaise. le dossier est complété par un portfolio de photographies aussi surprenantes que rafraîchissantes de Ryudai Takano issues de sa série de nus With Me, dans lesquelles le photographe pose dans le plus simple appareil auprès de ses modèles, ainsi que de portraits du danseur de butō de 77 ans Akaji Maro et de la championne d'apnée Hanako Hirose.


Tempura est un magazine que je lis de bout en bout et qui a le mérite de parvenir à m'intéresser à des sujets sur lesquels je n'aurais pas même songé à me pencher (architecture contemporaine, design, particularités langagières, etc.). À l'exception peut-être des chroniques d'Arthur Dreyfus dans les premiers numéros, amusantes mais d'un intérêt assez limité, la construction de la revue et le choix des rubriques comme des sujets abordés est un sans faute. Les nouvelles inédites qui y sont publiées, ainsi que la bibliographie du dossier et les notes ponctuant les articles me permettent de découvrir quantité d'auteurs et d'ouvrages… ce qui ne m'aide guère à avoir le dessus sur une pile à lire que les années rendent de plus en plus incontrôlable. J'apprécie beaucoup la partie du magazine intitulée Hors cadre, qui explore le Japon des marges et propose des portraits de travailleurs hors norme dans sa rubrique No Salaryman. J'attends avec impatience le prochain numéro qui aura pour thème le Japon populaire.


S'il prenait l'envie aux créateurs de la revue de lancer un magazine équivalent sur la Corée (Kimchi magazine ?), il est clair que j'en suivrais la parution avec tout autant d'intérêt. Je serais également amusée de découvrir qu'un éditeur Japonais publie une revue de même type consacrée à la France et intitulée – pourquoi pas – Poule-au-pot, ou, à la japonaise, Puropo.
Lien : https://mahautdavenel.wordpr..
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