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Critique de Prailie


Une lecture passionnante. Beaucoup d'aperçus très savants, de remarques très revigorantes. Emmanuel Todd, je crois veut avant tout nous démontrer que nos systèmes occidentaux traditionnels n'étaient pas construits sur un modèle si patriarcal que ça; que le statut des femmes dans les sociétés traditionnelles européennes , y était plutôt, sinon très élevé, et que les féministes contemporaines ( « cette petite bourgeoisie hypogame ») ont bien tort d'en appeler à la disparition de l'homme blanc de plus 50 ans ( ou tout au moins son statut….).

Néanmoins, j'ai trouvé que c'était un marteau infiniment savant pour écraser …. une presque mouche. S'il s'agit de constater la prédominance des femmes dans les sociétés occidentales modernes, qui ne voit qu'elle est déjà bien accomplie, avec toutes les conséquences sociétales et idéologiques que cela peut impliquer: plus grande tolérance envers l'étranger, à commencer par l'immigré; envers l'homosexualité, le transgenrisme. Mais aussi, nous explique-t-il, une angoisse nouvelle dont les femmes étaient jusqu'ici épargnées : car si les hommes se jettent et projettent plus facilement dans leur activité professionnelle [ en gros, très très gros, parce qu'ils sont physiologiquement incapables de mettre au monde un enfant] , la femme moderne , insérée dans les problématiques du monde du travail, ne pourrait-elle pas avoir rejoint » le monde mental autrefois exclusivement masculin de l'anxiété sociale »? Avec en parallèle un risque d'anomie ( dilution des valeurs communes à un groupe), les femmes étant par un conditionnement qui remonte au néolithique, moins portées sur les valeurs collectives que les hommes: chez les chasseurs-cueilleurs, en effet, les produits d'une collecte ( par les femmes) se partagent au sein d'une petite unité familiale . Tandis que les produits de la chasse (par les hommes) font l'objet d'un partage étendu au groupe.
E.Todd soulignant néanmoins , avec force graphiques et cartes mondiales comparatives, que pour nos sociétés occidentales les meilleurs témoins de ce que pouvaient être les sociétés de chasseurs-cueilleurs des temps préhistoriques ce ne sont pas les Aborigènes de la Nouvelle Guinée, de la Papouasie, si chers aux anthropologues, mais plutôt les Indiens des grandes plaines d'avant la conquête : les tribus shoshones, iroquoises, et autres…

En somme, notre auteur, en grand professionnel de la sociologie /anthropologie , ne se serait-il pas laissé piéger entre un discours infiniment technique et érudit, destiné à ses pairs, et une réflexion plus contemporaine, très impliquée dans les polémiques et les couac-couacs de l'époque?
Auquel cas me semble-t-il un ouvrage plus synthétique à destination du grand public aurait pu parfaitement convenir….

J'ai lu ce livre, en tout cas, avec beaucoup d'intérêt . J'y ai aimé les petites incursions d'auteur, lorsque l'homme, avec humour, transparaît derrière le chercheur … Et même si j'ai déjà à peu près tout oublié des savantes distinctions entre hyper et hypogame, entre patri et matri-localité, et j'en passe, j'ai apprécié de toucher du doigt la parfaite rigueur des études anthropologiques.
Lecture pas tout à fait facile, donc, mais que je ne saurais trop recommander.
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