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Critique de Eve-Yeshe


Tolstoï a écrit cette nouvelle en 1891, après avoir entendu la sonate de Beethoven, qui l'a ébranlé (au passage, j'aime Beethoven mais, pas du tout cette oeuvre, tout comme la symphonie héroïque), et il n'y va pas de main morte!

En gros, si on résume, le mariage est à rejeter, la sexualité battue en brèche : l'auteur prône la chasteté, purement et simplement et tant pis si l'espèce humaine est vouée à la disparition pure et simple. On a d'un côté les prostituées, de l'autre l'épouse qui se doit d'être vierge et pour finir, le mariage qu'il considère comme de la prostitution légalisée.

En fait, le héros Posdnicheff est doté d'un ego surdimensionné, et ramène tout à lui, même leurs six enfants passent au second plan pour lui, à part son préféré. Ses réactions lorsque le médecin interdit à sa femme d'allaiter leur premier enfant donnent une idée de son mode de fonctionnement. C'est à ce moment-là que la jalousie maladive se manifeste pour la première fois. Les enfants sont cause de troubles dans le mariage.

« Oui, la jalousie ; la jalousie sans cause, c'est la condition de notre vie conjugale débauchée, et, durant tout le temps de mon mariage, jamais je ne cessai de l'éprouver et d'en souffrir. »

L'auteur a choisi la jalousie, la folie de son héros pour exprimer cette conception de la femme et du mariage et exprimer le dégoût, opposant la fornication à la chasteté, mais aussi pour montrer la montée en puissance de la violence, de la colère qui vont aboutir à la mort. Il peut ainsi, exprimer comment un esprit dérangé peut interpréter tout ce qu'il voit ou entend pour étayer son raisonnement vicié à la base.

La place occupée par la musique est très importante, elle aussi : tout d'abord, c'est par la musique que se rencontrent la femme du héros et le musicien Troukhatchevski, tous deux interprétant « la sonate à Kreutzer », elle au piano, lui au violon. Et la complicité dans la musique suffit à déclencher la jalousie du mari.

Ce qui m'a plu également dans cette nouvelle, c'est la manière dont on alterne le récit du héros (qui raconte les évènements en les réinterprétant, tentant de les expliquer), ce qui donne un rythme rapide, logorrhéique, et en écho, le narrateur qui essaie de calmer les excès, un récit à deux voix, comme la sonate.

Une lecture vraiment troublante. J'ai dû m'accrocher pour aller jusqu'au bout, tant l'opinion du mariage et de la femme du héros m'irritait. Au moment où il a écrit cette nouvelle Tolstoï traversait une période sombre, mystique. Elle a, du reste, été très mal accueillie par ses lecteurs. On imagine la réaction qu'a pu avoir sa femme!

La deuxième moitié est plus facile, probablement car il y a moins de théorie et qu'on est davantage entré dans l'action proprement dite. Cette lecture a été difficile, mais elle m'a plu. Je ne la conseillerais pas pour aborder l'auteur, car il faut être familiarisé avec lui. Cependant, je préfère la manière dont Dostoïevski aborde la folie.

Cette vidéo qui alterne la sonate et le récit est sublime :

https://www.youtube.com/watch?v=vqu84m3M4Qo

Challenge XIXe siècle 2017
Lien : https://leslivresdeve.wordpr..
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